L’avis du Conseil d’Etat contre la légalisation des mères porteuses s’est vu qualifié par Elisabeth Badinter d’"avis moral qui ne tient compte ni de l’évolution des mentalités ni de l’évolution des techniques".
C’est par "souci d’humanité" et par "réalisme" qu’elle défend quant à elle la légalisation des mères porteuses. Son argumentation se fonde sur l’affirmation d’une construction a posteriori de la maternité : il n’y a pas d’instinct maternel dans la femme qui lui permettrait de reconnaître son enfant. Seules les relations "tricotées au jour le jour" dans l’éducation peuvent construire la maternité : "je crois qu’une femme peut tout à fait porter l’enfant d’une autre, soit parce qu’elle aime cet état, soit parce qu’elle veut aider un couple en mal d’enfant. On peut porter un enfant sans fantasmer, sans créer de relations autres que physiologiques et bienveillantes".
Pour Elisabeth Badinter, la légalisation est le seul moyen d’empêcher les dérives, notamment la mercantilisation du corps de la femme. Elle demande que la loi éventuelle soit assortie d’un droit au regret, qui permettrait à la mère porteuse de garder l’enfant à la naissance, si elle en éprouvait le désir.
A la question des problèmes psychologiques que pourraient développer les enfants issus d’une GPA en grandissant, elle réplique : "Je dis aussi que les enfants nés dans des conditions "orthodoxes" n’échappent pas non plus aux problèmes. (…) Chacun vit avec ses poids, ses chagrins. C’est la condition humaine".
Elle prétend enfin que sélectionner les femmes qui pourraient avoir des enfants, et condamner les autres à ne pas en avoir relèverait d’un eugénisme développé par "notre société, beaucoup plus frileuse aujourd’hui qu’il y a trente-cinq ans", lors de la légalisation de l’avortement.
Le Figaro Madame (Isabelle Girard) 10/07/09 – Madame Figaro 21/08/09