DPI : Jacques Testart dit non à la sélection humaine

Publié le 5 Jan, 2017

Suite à l’autorisation du Diagnostic Préimplantatoire (DPI) en Suisse (cf. Autorisation du DPI en Suisse : Des réactions multiples) en juin dernier, Jacques Testart est interrogé sur ses prédictions en matière de procréation assistée. En effet, il y a trente ans, le biologiste mettait en garde contre la sélection humaine, alors que le DPI n’existait pas encore : « Je me suis dit ‘du moment que l’on peut concevoir des œufs hors du corps humain, on peut enquêter sur chaque œuf, et donc opérer une sélection. A l’époque, on m’a traité de rêveur pessimiste : impossible de poser un diagnostic sur la base d’une seule cellule, m’a-t-on dit. Et aussi : les médecins ont signé le serment d’Hippocrate, ils ne se prêteront jamais à la sélection d’embryons. Quatre ans plus tard, c’était fait : en 1990, le DPI était là ». Avec cette technique « nous glissons inexorablement du désir d’enfant au droit à l’enfant et du droit à l’enfant au droit à l’enfant de qualité. On me reproche de parler d’eugénisme, mais le mot n’est pas usurpé ».  En outre, « les barrières législatives ont prouvé leur inefficacité » : au départ, on autorise le DPI pour les « maladies particulièrement graves », puis on dérive sur la pente glissante, puisque « la formule se prête à toutes les interprétations ». Et « de petit pas en petit pas, on va vers des bouleversements majeurs » (cf. Une proposition de loi pour aggraver le tri embryonnaire).

 

« Avant la fin du siècle, tous les enfants seront choisis dans les éprouvettes des biogénéticiens »[1] prédit Jacques Testart. Aujourd’hui, « la FIV constitue un véritable obstacle à la généralisation de l’instrument de sélection qu’est le diagnostic préimplantatoire. Elle reste pénible et son taux de réussite plafonne ». Mais avec l’annonce de chercheurs chinois au mois de novembre qui ont fabriqué chez la souris des ovules à partir d’un simple prélèvement de peau, « ce dernier verrou aussi est en train de sauter ». Car « la dernière barrière qui nous sépare de l’eugénisme consensuel dont je prédis l’avènement, c’est la production d’ovules, qui reste rare et complexe ». Jacques Testart avait pour sa part « imaginé que l’on se mette à en fabriquer à partir de cellules souches des ovaires, après une simple biopsie ». La « découverte japonaise va au-delà : on va pouvoir fabriquer des ovules à l’infini à partir d’un simple prélèvement de peau ! ».

 

Pour Jacques Testart, « l’eugénisme moderne, démocratique et mou est arrivé ». Or avec cette « idéologie du progrès », le risque est de perdre la diversité humaine : « après quelques générations de sélection généralisée, l’espèce aura muté et deviendra incapable de résister à une épidémie ». Plus encore avec cette idéologie, « l’enfant sur commande devient un objet et non un sujet, il annonce la médicalisation exacerbée des survivants du tamis génétique, la normalisation des sociétés et leur virage autoritaire ».

L’hebdo, Vincent Capman (5/01/2017)

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