Deuil périnatal : poster une photo pour empêcher la « négation de l’enfant »

Publié le 11 Jan, 2021

« Un bébé, yeux clos, le jour de sa naissance. » Instagram « héberge un gigantesque cimetière de nouveau-nés décédés ». Autant de photographies qui témoignent de deuils comme celui de Marie-Eve et de son conjoint Mathias qui ont appris que leur petite fille n’avait pas survécu après la césarienne. Avec le mot-dièse #stillborn[1], la plate-forme renvoie à 160 000 publications.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit le deuil périnatal « lorsque la mort de l’enfant intervient après vingt-huit semaines d’aménorrhée (ou à partir de 500 grammes) et jusqu’à sept jours après l’accouchement ». D’après les données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), 6 722 bébés sont nés sans vie en France en 2018. Les causes sont multiples, « interruption médicale de grossesse, réduction embryonnaire, mort fœtale in utero… », « mais aboutissent au même vide ».

« La société a du mal à reconnaître ce type de deuil »

Pour Julie, « à l’origine du compte Instagram “A nos étoiles“, entièrement consacré à la question du deuil périnatal », si les femmes ont besoin de montrer des photos de leur bébé décédé, c’est parce que « les parents sont isolés, réduits au silence ». Julie a elle-même affronté la perte de trois nourrissons. Elle témoigne avoir dû faire face aux réactions « maladroites », celles du personnel médicale en tête. « Ce n’était pas un vrai accouchement, vous allez oublier tout ça » lui avait dit la sage-femme après la naissance de sa fille mort-née, alors qu’elle avait « encore les pieds dans les étriers ».

« C’était pas un vrai bébé. » « Tu es jeune, tu en feras d’autres ! » Des phrases que Marie-Eve a entendues dans la bouche de ses proches. Lucie Roger, psychologue clinicienne spécialisée en périnatalité, explique : « C’est insurmontable pour l’entourage, qui en niant, se protège lui-même d’une réalité indicible ». Pour la praticienne, « la société a du mal à reconnaître ce type de deuil ». Alors « poster une photo de son bébé mort sur Instagram (…) empêche la négation de l’enfant ». Comme en témoigne cette mère qui a accompagné la photo de son bébé de la mention « Stillborn, but still born » (« mort-né, mais né quand même »).

La pratique s’explique également « quand le réel ne répond plus à ce besoin essentiel du deuil ». Aujourd’hui en France, « deux options sont proposées : les parents peuvent s’occuper de l’inhumation, ou en laisser la charge à l’hôpital, sans coût pour la famille ». Mais « Quand certains cimetières ont un bel endroit dédié, où l’on peut se recueillir, d’autres n’ont qu’un bout de terrain, pas accueillant », déplore Julie.

 

Source : Le Monde, Jane Roussel (07/01/2021)

[1] Mort-né en anglais

Partager cet article

Synthèses de presse

Les hommes aussi ont une « horloge biologique »

Les hommes aussi ont une « horloge biologique »

Ce mardi le cabinet d'Agnès Firmin Le Bodo doit recevoir les auteurs d'un rapport sur l'infertilité remis l'année dernière ...
Le sang de cordon pour prévenir les lésions cérébrales chez les grands prématurés

Le sang de cordon pour prévenir les lésions cérébrales chez les grands prématurés

Des chercheurs ont effectué les 1e tentatives de prélèvement de cellules de sang du cordon ombilical sur des bébés grands ...
Passeport
/ PMA-GPA

Namibie : la Cour suprême annule la citoyenneté d’un enfant né par GPA

Lundi, la Cour suprême namibienne a annulé une décision accordant la citoyenneté à un petit garçon né par GPA en ...

Textes officiels

Fiches Pratiques

Bibliographie

Lettres