De la pertinence éthique et anthropologique de Dignitas personae (suite)

Publié le 27 Jan, 2009

Pierre-Olivier Arduin, responsable de la Commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon, revient sur l’Instruction Dignitas personae (cf. Synthèse de presse du 12/12/08) et analyse pourquoi l’Eglise dit non à l’Assistance médicale à la procréation (AMP). Dans cette deuxième partie, il s’attache au "scandale des embryons congelés" (cf. 1ère partie dans la Synthèse de presse du 16/01/09).

L’assistance médicale à la procréation (AMP) va de facto de paire avec la mise en place d’un système de cryoconservation des embryons dits "surnuméraires" : "pour ne pas répéter les prélèvements d’ovocytes chez la femme, on opère un prélèvement unique de nombreux ovocytes que l’on féconde in vitro, et l’on conserve congelés une partie importante des embryons ainsi obtenus, en prévision d’un deuxième cycle de traitement, en cas d’échec du premier essai, ou pour les cas où les parents désireraient une autre grossesse".

Au 31 décembre 2006, la France recensait ainsi 176 523 embryons congelés, soit 34 512 de plus qu’en 2005, ce qui représente une augmentation de 25% en une année. De tels chiffres devraient nous conduire à nous demander pour quelles raisons la France ne s’aligne pas sur des Etats comme l’Italie, l’Allemagne ou l’Autriche qui interdisent sur leurs territoires la cryoconservation embryonnaire.

Et ce, d’autant que l’on connaît la souffrance des parents "face au difficile problème du sort des embryons en trop" (cf. Synthèse de presse du 08/12/06). Passé le délai de cinq années de cryoconservation, les parents doivent choisir entre réactiver un désir d’enfant, céder leurs embryons à un couple adoptif ou à la science ou encore les détruire.

Dignitas personae dénonce ainsi un système injuste et tente de trouver une issue au sort de ces embryons congelés. Mais, "parce qu’il n’y a pas de remède", l’Instruction appelle à ce que cesse toute production d’embryons humains. Surtout quand on sait combien la cryoconservation expose les embryons "à de graves dangers de mort ou à des altérations de leur intégrité physique, ainsi que le montre le pourcentage élevé qui ne survit pas à la technique de congélation et de décongélation". En plus de les priver de l’accueil maternel, cette situation les expose donc à de graves manipulations.

Ainsi l’AMP est-elle devenue le premier fournisseur de matière première embryonnaire pour les chercheurs… Soulignons que seuls 52,8% des embryons actuellement congelés font encore l’objet d’un projet parental. 

L’auteur dénonce ensuite le "coût exorbitant pour la société" qu’engendre l’AMP. En 2006, l’AMP a dû coûter à l’Assurance maladie un total d’environ 245 millions d’euros – on estime à 40 euros par an les frais de garde d’un embryon congelé, à 1 000 euros le coût d’un cycle d’insémination artificielle, à 3 000 euros celui d’une FIV, à 3 500 euros celui d’une ICSI et à 1 100 euros celui d’un transfert embryonnaire – ce qui, rapporté aux 20 000 enfants nés d’une fécondation artificielle, fait que chaque naissance coûte environ 12 000 euros.

Par ailleurs, Pierre-Olivier Arduin rappelle que l’AMP ne soigne pas la stérilité mais la contourne. "Nous sommes plutôt dans le champ de l’ingénierie biotechnique si bien qu’au lieu de l’assistance médicale à la procréation – ce n’est ni un acte de procréation, ni un acte médical – on devrait parler de production d’embryons. Il s’agit seulement d’un acte technique qui requiert du matériel bio cellulaire (les gamètes) et du matériel idéologique (le projet parental)."

C’est pour toutes ces raisons que l’Eglise rejette l’AMP et encourage la médecine à chercher à vaincre la stérilité. Ainsi prête-t-Elle une attention particulière à la prévention de la stérilité : "une partie non négligeable des cas d’infécondité qui se présentent aujourd’hui au médecin, chez la femme comme chez l’homme, pourraient être évités, si la vertu de chasteté était vécue plus fidèlement, si les sujets adoptaient un style de vie plus sain, et si les facteurs de risque aux niveaux professionnel, alimentaire, pharmacologique et écologique étaient éliminés". Outre les polluants chimiques, le tabac et l’alcool, est visé le recul de l’âge moyen de la maternité qui, en France, est passé de 24 ans en 1970 à 29,6 ans en 2005.

Mais, "parce qu’il existera toujours des infertilités sans remèdes, l’Eglise ne craint pas de proposer aux "couples stériles" de se lancer dans l’adoption", appelant les responsables politiques à encourager et faciliter cette démarche.

Liberté politique.com 23/01/09

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