Nouria Hernandez, généticienne et rectrice de l’Université de Lausanne estime que « le grand public n’est pas suffisamment au fait des nouvelles possibilités offertes par les outils génétiques », et « n’a pas encore pris la mesure de toutes les possibilités offertes par le génie génétique ». CRISPR-Cas9, qui permet des manipulations précises du vivant, pose des questions dont la société doit se saisir en urgence : « Les manipulations du vivant sont-elles souhaitables ? Comment les encadrer pour éviter les dérives ? »
Que pense le grand public des modifications génétiques des gamètes ou des embryons humains à un stade très précoces ? Ce type de manipulation « ouvre la porte à des changements génétiques non plus seulement chez des personnes isolées, mais au sein même de la lignée humaine ». Pour la généticienne, « on considère souvent qu’une modification génétique est acceptable si elle améliore significativement la santé d’un personne. Mais dès lors qu’une telle modification peut se transmettre à la génération suivante, alors on prend une décision pour des personnes qui ne sont pas encore nées ! » En outre, sur ces questions, « il existe un décalage entre le grand public et les scientifiques ».
Quelles limites à ces manipulations ? « Le fait de supprimer un gène qui cause une grave maladie transmissible semble positif. Mais qu’en est-il si la modification génétique permet seulement d’atténuer les symptômes ? ». Si la modification dépasse le cadre strictement légal ? « Souhaite-t-on concevoir des êtres humains moins agressifs, sans tendance à l’obésité ou aux addictions » ?
Le Temps, Pascaline Minet (8/03/2017)
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