Daniel Jacques, directeur de la revue Argument et auteur de La Révolution technique*, a dressé un double constat suite à "l’affaire des clones" : les institutions politiques se sont révélées impuissantes et le débat qui a suivi a montré un certain aveuglement moral.
Nous sommes en pleine "révolution technique" : de nouvelles disciplines telles que la génomique, l’informatique ou les neurosciences nous conduisent vers une métamorphose radicale de la réalité humaine. Face à l’ampleur et la rapidité de ces transformations, les Etats-Nations ne sont pas capables d’en maîtriser les acteurs techniques et économiques. Daniel Jacques s’interroge sur l’efficacité d’une gouvernance mondiale en ce domaine.
Il remarque que pour le moment le clonage fait peur car c’est une technologie à risque mais dès qu’elle deviendra sûre, les réticents seront de moins en moins nombreux au nom du "bonheur" promis.
La vraie question est de savoir vers quelle humanité ces techniques nous entraîneront dès lors qu’elles seront devenues parfaitement sans risque. Daniel Jacques se demande "si nous aurons encore des raisons pour limiter d’une manière ou d’une autre ce désir de perfection qui peut faire tout autant notre grandeur que notre misère" et "si l’éducation que nous offrons à nos enfants suffira, car à trop rechercher le profit et la compétence, à vouloir la performance et la nouveauté à tout prix, il n’est pas certain que nous cultivions dans l’esprit des nouvelles générations la distance spirituelle et morale nécessaire à la mesure de notre présent".
* parue chez Boréal (2002)
Le Devoir (Daniel Jacques) 10/02/03