Didier Sicard, président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), revient sur la distinction qui est faite entre le clonage reproductif et le clonage thérapeutique. Il s’étonne que le premier soit regardé avec effroi et le second avec fascination car, rappelle-t-il, leur origine est la même : un embryon cloné qui d’un côté aboutira à la naissance d’un enfant et de l’autre servira à la recherche. La différence entre les deux est conceptuelle, elle tient dans le projet fait sur cet embryon par les chercheurs ou les parents. Or, "on sait que le désir humain est tout sauf rationnel, toujours difficile à encadrer par la loi".
D. Sicard redit son opposition au clonage reproductif : "la programmation d’un nouvel être en fonction d’un programme génétique existant est une insulte à l’avenir". "Un enfant n’est pas une programmation mais une espérance dans un futur toujours ouvert".
La technique du clonage suppose des millions d’embryons qui deviendront fournisseurs de lignées cellulaires, des gamètes de femmes détournés de leur fonction initiale de perpétuation de l’espèce pour devenir des précurseurs de tissus et d’organes. Le clonage thérapeutique est donc "une transgression fondée sur un espoir thérapeutique ténu, que bien d’autres moyens plus respectueux de l’être en devenir peuvent contribuer à obtenir (cellules souches adultes, travail sur la différenciation cellulaire)".
Didier Sicard voit deux dérives dans le clonage d’embryon : "programmer un enfant futur en fonction d’un passé" et "se servir du début de la vie pour surseoir à la finitude". Dans les deux cas, conclut Didier Sicard "l’être humain au nom du progrès régresse et s’éloigne de ce qui devrait le fonder : l’humilité, la confiance et l’altérité comme fondatrice du sens. On ne clone pas l’espérance".
Libération (Didier Sicard) 26/02/03