Bébé médicament : jusqu’où peut-on manipuler la vie ?

Publié le 19 Fév, 2021

Les députés ont réintroduit le principe du bébé-médicament dans le projet de loi de bioéthique toujours en discussion, autorisant la création d’autant d’embryons nécessaires. Sous le titre « L’enfant du double espoir », France 5 présentait opportunément le 9 février dernier un documentaire sans nuances sur le cas d’une famille ayant fait le choix de concevoir un enfant pour en guérir un autre.

César a 4 ans et il est atteint de l’anémie de Fanconi. Cette maladie entraîne un dysfonctionnement progressif de la moelle osseuse et des cancers chez le jeune adulte. L’espérance de vie de César est courte. Une greffe de moelle osseuse lui permettrait de vivre jusqu’à 35 ans. C’est ainsi que les reporters de France 5 ont suivi le parcours de Charlotte et Olivier, les parents de César, pour obtenir un « bébé médicament » dans le but de sauver leur petit garçon malade. Ce sera Marceau, le troisième enfant de la famille, exempt de la maladie et compatible avec César. À sa naissance, le sang de cordon de Marceau, riche en cellules souches, sera prélevé pour servir de greffon. 

Cependant, sous les sentiments les plus généreux, l’envers du décor n’est pas sans interroger. Pour la grammairienne Ingrid Riocreux qui décrypte le documentaire, « la pratique du bébé médicament est la perversion ultime d’un monde où la vie d’un enfant n’est légitime que si elle a été désirée ». Peut-on fabriquer sans conséquence un enfant pour en sauver un autre ?

Une pratique officiellement abandonnée

En France, la pratique du « bébé médicament », autorisée par la loi, a été abandonnée en 2014. En effet, la loi de 2004 dispose que tous les embryons sains sont implantés avant d’envisager une nouvelle ponction ovocytaire. Cette mesure conduit des parents à des décisions « crève-cœur » qui ne « sauvent » pas leur enfant malade. De leur côté, comme du côté des soignants, le coût affectif est jugé « trop important ».

En Belgique, où Charlotte et Olivier seront envoyés par l’hôpital Robert-Debré qui pratiquera la greffe de sang de cordon, le nombre de cycles par femme ou par couple n’est pas limité. Il est possible de produire autant d’embryons que nécessaires jusqu’à trouver celui qui sera compatible. Un autre couple anglais explique que sur treize embryons créés, trois étaient compatibles, deux ont été implantés. Certains couples n’obtiendront pas ces « bébés du double espoir » même après six ou sept ponctions. Soit… 70 embryons créés ! La possibilité d’avoir un enfant exempt de la maladie est seulement de 10%.

Pas d’IMG mais des destructions et des congélations d’embryons

Charlotte justifie sa démarche en expliquant qu’elle n’avait pas« envie d’une IMG »La pratique du bébé médicament implique la création d’embryons et une sélection via un diagnostic préimplantatoire. Les embryons, fabriqués in vitro, vont être testés pour évaluer non seulement s’ils sont exempts de la maladie de Fanconi mais aussi compatibles avec César : c’est le typage HLA (des antigènes d’histocompatibilité). L’embryon sélectionné sera ensuite transféré dans l’utérus de la mère.

Cet article de la rédaction Gènéthique a été initialement publié sur Aleteia sous le titre : Les lourds secrets qui se cachent derrière le bébé-médicament

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