François Lemaire, professeur de réanimation médicale à l’hôpital Henri Mondor de Créteil, revient sur la position délicate des réanimateurs dans les situations de fin de vie à cause notamment de l’ambiguïté et de la polémique qui entourent ces pratiques : euthanasie passive, active, directe, indirecte, homicide volontaire, involontaire, empoisonnement ?
Très clairement, il explique qu’il "faut dissocier le problème de l’arrêt des soins actifs en réanimation du débat en cours sur l’euthanasie". Arrêter les soins actifs, c’est arrêter l’acharnement en réanimation, c’est interrompre des techniques de survie artificielle. Ce n’est donc pas mettre fin à la vie du malade mais c’est "cesser de s’opposer à une mort devenue inéluctable". F. Lemaire rappelle que le pape Pie XII affirmait en 1957 dans un texte "d’une prodigieuse actualité" : "on ne veut pas ainsi donner la mort, on accepte de ne pouvoir l’empêcher".
Ainsi F. Lemaire, redonnant la définition de l’euthanasie "acte pratiqué par un tiers qui met intentionnellement fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci", explique que le débat sur l’euthanasie n’est pas celui des réanimateurs. Le concept inexact "d’euthanasie passive", utilisé à la place d’arrêt de l’acharnement des soins, doit être abandonné.
Il y a donc une séparation "claire, tranchée, explicite" à faire entre "l’arrêt ou la limitation des soins actifs de réanimation" et "le fait de donner la mort".
Pour François Lemaire "l’évolution législative éventuelle", sans toucher aux articles du code pénal sur le meurtre ou à l’article 38 ou code de déontologie, devrait préciser dans le code de santé publique que la "non-mise en oeuvre ou l’arrêt des techniques de réanimation, sous certaines conditions, ne devrait pas exposer les médecins au risque de mise en cause judiciaire".
Le Monde (François Lemaire) 11/06/04