Près de 10 ans après l’arrêt Perruche rendu par la Cour de cassation (17 novembre 2000) qui avait établi un droit à obtenir une réparation du préjudice d’être né après une erreur de diagnostic médical, le Conseil constitutionnel va se prononcer sur la loi votée pour contrer cette jurisprudence. L’arrêt de la Cour avait suscité de vifs débats, et le législateur a disposé, par la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades, que "Nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance". En revanche, la loi précise que seuls les parents peuvent obtenir une réparation de leur propre préjudice, indemnisation qui ne couvre pas les charges afférentes au handicap de l’enfant. Concernant ces charges, le législateur a choisi de renvoyer à la solidarité nationale. C’est cette loi que conteste Mme L., mère d’un enfant myopathe, devant le Conseil constitutionnel (Cf. Synthèse de presse du 16/04/10).
Pour Maître Arnaud Lyon-Caen, l’avocat de la requérante devant le Conseil constitutionnel, l’interdiction posée par la loi a pour conséquence que "le préjudice résultant du handicap de l’enfant n’est réparable ni à la demande de l’enfant ni de ses parents", et est donc en contradiction avec les principes constitutionnels de responsabilité et de réparation intégrale. Par ailleurs, il reproche à la loi de "faire porter à la charge du contribuable les dommages causés par la faute de quelques médecins ou laboratoire". Enfin, Maître Lyon-Caen affirme qu’ "il ne s’agit pas d’obtenir pour l’enfant réparation du préjudice d’être né, mais du handicap dont il souffre, et de lui permettre de vivre une existence digne". A ces arguments, le représentant du gouvernement objecte que la loi de 2002 ne viole aucun principe constitutionnel, car "la faute médicale n’a ni causé ni aggravé le handicap" (Cf. Lettre mensuelle de mai 2010). De plus, il argue que la loi ne prive pas les parents de la possibilité d’un recours juridique contre la faute commise. La solidarité nationale n’implique pas l’irresponsabilité des professionnels de la santé, et la loi de 2002 respecte, selon lui, l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui pose le principe constitutionnel de responsabilité.
La décision du Conseil constitutionnel est attendue le 11 juin.
La Croix (Céline Rouden) 03/06/10