Les lacunes de la prise en charge de la douleur

Publié le 16 Oct, 2006

Les journées du Centre national de ressources de lutte contre la douleur (CNRD), qui se tiendront cette semaine, dresseront le bilan de la prise en charge de la douleur en France. Si, depuis 10 ans, de réels progrès ont été faits, restent de nombreuses lacunes au début et à la fin de la vie.

Pour le Dr Daniel Hannequin (hôpital Trousseau, Paris), "c’est un comble, car les nourrissons ou les personnes très âgées sont évidemment les êtres les plus fragiles". Mais il reconnaît que, parce que ces personnes ont du mal à s’exprimer, il est "facile de passer à côté de leurs douleurs".

Une enquête a donc été menée, entre septembre 2005 et janvier 2006, notamment dans les 13 centres de réanimation néonatale et pédiatrique d’Ile-de-France, pour relever tous "les gestes inconfortables et douloureux". Pour le Dr Ricardo Carbajal, coordinateur de cette étude, cela a permis "de noter le nombre impressionnant de gestes douloureux que doit subir chaque nouveau-né en réanimation. En moyenne il est de 70 par enfant". "Plus d’un geste sur trois n’est accompagné d’aucune prescription antidouleur" ajoute-t-il. D’après le Dr Carabajal, "un travail important est nécessaire pour changer les mentalités".

Il en est de même pour la prise en charge de la douleur chez les personnes très âgées. "On dit que les vieux ont mal, que les vieux souffrent mais que c’est normal… puisqu’ils sont vieux" déplore le Dr Pierre-Henri Cornu, chef du service de gérontologie clinique de l’hôpital René-Muret à Sevran (Seine-Saint-Denis). 50% des personnes âgées en institution souffriraient de douleurs non soulagées. "D’un côté, les personnes âgées ont souvent plusieurs douleurs et elles ont du mal à en parler. Et de l’autre – chez le personnel médical ou soignant – il y a toujours un maniement mal maîtrisé des antalgiques. Avec des résistances, par exemple, à donner de la morphine. Ou le recours trop systématique à des traitements standards qui ne prennent pas en compte la singularité de la personne" analyse le Dr Véronique Dares, présidente du comité de lutte contre la douleur à l’hôpital René-Muret.

Le Dr Cornu a par ailleurs recensé les douleurs "non-héroïques", c’est-à-dire celles quotidiennes et banales. Pour les pansements, 8% des personnes âgées disent avoir eu mal. Pour les déplacements, 10% disent avoir eu très mal et 20% disent avoir eu mal. Pour la toilette, 60% parlent de douleurs ; sans compter l’inconfort lié au froid ou à la pudeur si bien qu’on arrive à 75% de personnes pour qui ce moment est "désagréable". Ces douleurs sont connues et pourraient être facilement évitées.

Le plan de lutte contre la douleur, crédité de 14 millions d’euros, et lancé par le ministre de la Santé il y un an est loin d’avoir comblé toutes les lacunes dans ce domaine. "La priorité, c’est la formation des soignants" conclue le Dr Véronique Dares.

 

Libération (Eric Favereau) 16/10/06 – Le Monde (Paul Benkimoun) 18/10/06 – Le Quotidien du Médecin (Nicolas Bauche) 20/10/06

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