Dans le cadre du séminaire d’Ethique biomédicale du Collège des Bernardins, le Père Matthieu Villemot, professeur de philosophie à la Faculté Notre Dame du Collège des Bernardins, « s’interroge sur le statut de la chair dans la pensée transhumaniste ».
Mon corps a une dimension non seulement physique, mais aussi affective. C’est cette dernière qui constitue « la chair », et qui est remise en question par le transhumanisme. En effet le transhumanisme ne propose pas seulement d’ « améliorer nos corps par des exosquelettes, des manipulations génétiques, une interface homme/machine », mais souhaite aussi « donner à l’individu un contrôle extrême sur sa chair », en supprimant la souffrance, en démultipliant la concentration ou la mémoire.
Le Père Villemot ne discute pas ici de la faisabilité des projets, mais bien de leur « pertinence morale et humaine ». Or de « telles promesses ne reviennent pas à augmenter la chair mais à la supprimer ». Sans refuser toute forme de recherche pour « mieux réguler sa chair », il dénonce l’ « accroissement quantitatif [qui] crée une modification qualitative » : contrôler sa chair « comme un drone, c’est ne plus avoir de chair ». Au contraire, « ma chair, par ses paradoxes, m’interpelle et m’accule à choisir ce que j’en ferai. M’y abandonner, l’éduquer, la contourner, en chercher le sens ? ». Et « qui plus est, les paradoxes de la chair font le sel de la vie ».
Sa réflexion invite à s’interroger sur l’intérêt d’ « améliorer sa vie », au prix de ce qui en fait le sel.
La Croix (15/04/2016)