Le DPI et l’embryon : quels enjeux ?

Publié le 16 Nov, 2006

Le diagnostic préimplantatoire (DPI) fait l’actualité. D’un côté, le Téléthon est contesté par certains parce qu’il utilise la technique du DPI. De l’autre, fin septembre, deux équipes de généticiens (de Montpellier et de Strasbourg) ont annoncé vouloir d’élargir le DPI à l’identification, sur l’embryon créé in vitro, d’une "prédisposition" à certains cancers (cf. revue de presse du).

Derrière le DPI, issu des avancées de la génétique et de l’assistance médicale à la procréation, c’est la question de l’eugénisme qui se pose. C’est pourquoi, le DPI "ne peut pas ne pas inquiéter, émouvoir, passionner". En réalité, l’objet même de la fécondation in vitro, de "fournir une réponse thérapeutique à la stérilité", a vite été dépassé. Ainsi pour les couples exposés au risque de transmettre une anomalie génétique, le DPI s’appliquant aux embryons créés in vitro, permet de sélectionner les embryons malades et de n’implanter que les embryons exempts de l’anomalie génétique.

Au moment des débats sur la légalisation du DPI au début des années 1990, les partisans du DPI ont fait valoir que cette pratique ne relevait que d’une "forme précoce de diagnostic prénatal", autorisé et encadré par la loi. Les adversaires du DPI, de leur côté, ont alerté sur le caractère eugénique du DPI et ses dérives.

En 1994, le DPI fut voté : la loi de bioéthique prévoyait que le tri embryonnaire ne s’appliquait que dans le cas d’affections "d’une particulière gravité" et "incurables au moment du diagnostic".
Lors de la révision des lois de bioéthique, en 2004, il est prévu d’élargir le champ d’application du DPI au "bébé-médicament".
Il s’agit de créer in vitro des embryons et de sélectionner celui dont le système immunitaire est compatible avec celui d’un frère ou d’une sœur malade, afin de prélever sur lui les tissus ou cellules nécessaires pour guérir l’aîné. Jean-Yves Nau interroge : "pouvait-on, en d’autres termes, s’autoriser à programmer la naissance d’un enfant qui, au stade embryonnaire de son développement, aurait été retenu au motif que certaines de ses caractéristiques biologiques permettraient, peut-être, de sauver son frère ou sa sœur, tôt condamnés à mort?". En 2002, le Comité consultatif national d’éthique, dans un avis, se montrait plutôt défavorable à cette pratique. Une minorité seulement avait soutenu la légalisation des bébé médicaments "par souci de solidarité". L’extension du DPI au bébé médicament est finalement voté dans le cadre de la loi de bioéthique de 2004. Les décrets d’application ne sont pas encore parus.

Sur l’extension du DPI à la prédisposition de certains cancers, le dossier a été saisi par l’Agence de la biomédecine et l’Institut national du cancer. Carine Camby, directrice de l’agence de la biomédecine, estime que cette extension est "contraire aux dispositions législatives en vigueur". Jean-Yves Nau conclut : "peut-on, en d’autres termes, accepter aujourd’hui en France un tri des embryons fondé non plus sur la certitude génétique, mais sur une probabilité statistique ?"

Le Monde (Jean-Yves Nau) 16/11/06

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