La défense de la Vie sanctionnée au sein de l’Université catholique de Louvain

Publié le 4 Avr, 2017

La récente mésaventure subie par Stéphane Mercier à l’université catholique de Louvain démontre qu’Internet n’est pas le seul lieu où la libre parole en matière d’avortement est entravée (cf. IVG en Belgique : marche pour la vie été débat sur la liberté d’expression et Délit d’entrave à l’IVG : l’Assemblée nationale censure la liberté d’expression).

 

Chargé de cours au sein de cet établissement où il avait suivi l’ensemble de son cursus universitaire, Stéphane Mercier a abordé la question de l’avortement dans un cours de philosophie, en y défendant, de manière argumentée, la valeur absolue de la vie humaine dès la conception. L’enseignant a expliqué dans le Journal La libre Belgique (29 mars) qu’il voulait « aborder une question importante, en conformité avec le cahier de charge du cours de philosophie, centré sur la question de l’homme ; et proposer par le fait même un exemple d’argumentaire philosophique »[1]. Mais aujourd’hui, il apparaît que conclure une argumentation raisonnée en affirmant que l’avortement met fin injustement à une vie n’a pas sa place dans l’établissement d’enseignement supérieur qu’est l’université catholique de Louvain. En effet, après la médiatisation du contenu du cours, l’UCL a promptement publié un communiqué sidérant : « Les autorités de l’UCL viennent de prendre connaissance d’un écrit de M. Mercier, chargé de cours invité à l’Institut de philosophie, à propos de l’avortement. Elles ont immédiatement convoqué la personne concernée afin de l’entendre et d’instruire le dossier. La personne sera entendue afin d’éclaircir le statut de cet écrit et l’usage éventuel qui en est fait dans le cadre de son enseignement. Quelle que soit l’issue de l’instruction, le droit à l’avortement est inscrit dans le droit belge et la note dont l’UCL a connaissance est en contradiction avec les valeurs portées par l’université. Le fait de véhiculer des positions contraires à ces valeurs dans le cadre d’un enseignement est inacceptable ».

 

Depuis, Stéphane Mercier a été licencié.

 

La sanction prononcée illustre l’efficacité d’une politique de délation qui agit en  police de la pensée et qui s’exerce aujourd’hui en Belgique comme en France selon un procédé bien huilé. Une association appelée Synergie Wallonie pour l’égalité (http://synergie-wallonie.org/), par ailleurs très investie pour la promotion de l’idéologie du genre, se saisit de l’affaire et la porte sur la place publique. Les médias officiels relaient ensuite l’information et le tapage prend forme. Manquant de courage et de conviction, l’institution concernée bat en retraite avec une rapidité déconcertante.

 

Du strict point de vue universitaire, la sanction subie par Stéphane Mercier contrevient à la liberté académique, à laquelle il a droit dans l’exercice de sa fonction de chargé de cours au sein de l’université : « J’ai usé de la liberté académique. Il n’y a aucun abus ! J’ai présenté un argumentaire philosophique en faveur du droit à la vie »[2]. Sur le site de l’UCL, la rubrique « valeurs et visions » (https://uclouvain.be/fr/decouvrir/valeurs-et-vision.html) précise que « les académiques disposent de la liberté académique, inscrite dans la constitution, c’est-à-dire la liberté de pensée dans la recherche d’une vérité construite scientifiquement et non soumise à la norme du moment ». A propos des « normes du moment », le conseil académique de cette université a approuvé « la politique du genre de l’UCL »[3]. Il est pour le moins regrettable d’accompagner la promotion du genre mais de censurer une argumentation en faveur de la vie en la décrétant contraire aux « valeurs » de cet établissement, en dépit du pluralisme affiché et de la liberté académique officiellement reconnue. Deux professeurs de l’UCL ont courageusement pris position dans cette polémique en demandant qu’aucune sanction ne soit prise à l’encontre de Stéphane Mercier. « Il est pour le moins surprenant, écrivent-ils, de constater l’émergence à l’UCL d’une sorte de néo-cléricalisme de la bien-pensance politiquement correcte, d’une forme de nouvelle police de la pensée qui frapperait les positions minoritaires lorsqu’elles sont prises à partie par les médias et qu’elles sont susceptibles de heurter une majorité de l’opinion »[4]. Peine perdue pour l’instant…

 

Cette affaire s’inscrit dans un contexte général d’étouffement de la liberté d’expression des défenseurs de la vie humaine depuis le commencement, comme si, au sein des sociétés occidentales, l’avortement était devenu une « valeur » centrale, un « droit fondamental » (ce qu’il n’est pas juridiquement, cf. L’avortement, droit ou drame ? et L’avortement ne pourra jamais être un « droit fondamental », ni une « liberté »), qu’il est interdit de critiquer sous peine d’opprobre publique, de menace ou de sanction. Monsieur Stéphane Mercier vient d’en faire la triste expérience. A ce rythme, le simple fait de prendre position contre l’avortement dans un lieu public sera bientôt assimilé à un délit d’entrave (cf. Délit d’entrave à l’IVG : Suppression du délit d’opinion mais contrôle de l’information, la décision en demi-teinte du Conseil Constitutionnel), alors que c’est la liberté d’expression qui est entravée. Ce licenciement ne doit pas rester sans réaction.

 

Joël Hautebert

Professeur des Universités

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