C’est hier après-midi, 21 janvier, que le Premier ministre M. Valls ouvrait officiellement le débat sur la fin de vie à l’Assemblée nationale.
Après « plus de deux ans de consultations« , l’ouverture de ce débat était très attendu de la majorité, et surtout du groupe Europe Ecologie Les Verts (EELV) qui présentait le matin même à la commission des affaires sociales une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie et le suicide assisté.
Dans l’hémicycle
Le débat parlementaire amorcé par Monsieur Valls se fondera sur la proposition de loi Claeys-Leonetti (décryptage de Gènéthique ici) « qui ont voulu faire de leur travail un symbole d’une possible unité autour d’un sujet qui divise« . Pour ce faire, ces deux parlementaires ont écarté les termes d’euthanasie et de suicide assisté pour s’orienter vers une troisième voie : « un droit à une sédation profonde et continue en toute fin de vie […] comme un droit de dormir avant de mourrir ».
Le Premier Ministre, « lui même rapporteur en 2009 d’un texte du PS pour une aide active à mourrir » soutient cette proposition de loi qu’il juge « équilibrée« , et considère « qu’il est « important d’avancer, quitte à le faire par paliers progressifs« . Les représentants des groupes politiques ainsi que plusieurs autres parlementaires se sont succédés au perchoir pour exprimer leurs positions par rapport à la proposition de loi. « Il faut que toutes les sensibilités puissent s’exprimer » affirme Alain Claeys. Véronique Massonneau, député EELV, par exemple, rapporteur de la proposition de loi sur l’euthanasie et le suicide assisté, l’annonce : « je voterai la PPL Leonetti-Claeys […] si le débat parlementaire ne vient pas la défaire« . Tandis que Philippe Gosselin, député UMP, « appelle à la prudence et demande une montée en charge des moyens accordés aux soins palliatifs« .
Précision importante, les groupes socialiste, UDI et Front de gauche ont assuré à leurs députés leur liberté de vote.
Les réactions des citoyens, d’associations, et des institutions
Juste avant que le débat parlementaire ne commence, l’association « Soulager mais pas tuer« se mobilisait aux alentours de l’Assemblée, mais aussi à Nantes, Caen, Rennes, Pau, Bordeaux et Bourges. Des milliers de personnes venues pour manifester leur opposition à la proposition de loi Claeys-Leonetti qui « instaurerait une euthanasie qui ne dit pas son nom« .
Au même moment, 16 médecins publiaient un manifeste pour demander la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté qui serait comme « un ultime soin ».
A la veille de ce débat, les évêques de France faisait entendre leur voix : « Le développement d’une culture palliative […] doit être une cause nationale prioritaire » – le nouveau droit à la sédation […] ne doit pas forcément être profonde et continue jusqu’au décès […] elle peut être intermittente […] toujours pour soulager de la souffrance et ne jamais viser la mort ».
Valérie Debord, secrétaire nationale de l’UMP chargée de la famille, affirmait dans une tribune : créer « une possibilité pour le corps médical de donner la mort […] reviendrait à instaurer un droit à la mort, équivalent d’un droit à la vie« , « l’urgence est de remédier au vrai scandale auquel sont confrontés les fammiles » : la carence des soins palliatifs en France. « 80% de ceux qui pourraient avoir accès aux soins palliatifs en sont exclus » rappelle-t-elle.
Enfin, Jean-Marie Le Méné et Tugdual Derville mettent en garde dans une interview croisée contre ce piège du concenssus: « Le fait d’avoir confié à Jean Leonetti la révision de sa propre loi […] est un coup politique qui risque de piéger l’actuelle opposition : il s’agit pour nous de résister à un projet qui essaie de s’imposer par un pseudo concenssus alors qu’il biaise le débat en évitant les mots qui fâchent » analyse T.Derville. J.-M. Le Méné prévient lui aussi : « puisque le mot euthanasie n’est pas dans la loi on pense l’éviter ». Attention au « repli politique » qui consiste ériger en référence une loi qui permet de tuer Vincent Lambert insiste-t-il. La même logique se révèle pour l’avortement poursuit-il : « certaines féministes revendiquent la « liberté d’aspiration ». On va se retrouver dans une situation paradoxale où ce sera à nous de défendre la loi Veil! ».
Gènéthique a suivi en direct le débat à l’Assemblée.
Pour lire le décryptage de Gènéthique, voir: Le rapport Claeys-Leonetti est-il déjà dépassé?
Pour lire prendre connaissance des échanges entre les députés, cliquez sur : Les différents groupes parlementaires prennent position sur la fin de vie