Comment définir la mort ?

Publié le 31 Jan, 2004

Un article de Bernard Marie Dupont, généticien et professeur de philosophie (1) pose des questions fondamentales sur la définition de la mort aujourd’hui.

 

Mort cérébrale
La notion de mort cérébrale, apparue en 1959, a bouleversé les règles du « mourir humain » en supprimant la règle de la triple unité de lieu, de temps et d’action.

 

Le lieu : la fin de vie se déplace du domicile vers l’hôpital ; aujourd’hui, 75% de la population meurent en institution spécialisée, du moins dans les pays riches et occidentaux.

Par ailleurs, la mort s’est déplacée du coeur vers le cerveau ; la mort

cérébrale s’est substituée, y compris légalement, à la mort cardio-vasculaire.

 

Le temps : les progrès remarquables de la réanimation conduisent parfois à une mort par étapes. Il est devenu possible de maintenir en état de fonctionnement biologique des êtres humains dont le cerveau est irrémédiablement détruit. « Se développe aussi une multitude d’états intermédiaires, de comas plus ou moins profonds, de paralysies plus ou moins complètes. Il n’y a donc plus un avant la mort et un après la vie, mais une succession sans limites d’espaces de moindre être, un no man’s land, véritable purgatoire laïc ou fourre-tout médical dans lequel la personne est peu à peu amputée de son humanité ».

 

L’action : la réanimation aliène la liberté de celui qu’elle sauve. « Libéré pour un temps de la mort, mais paralysé pour le temps qui lui reste, le scaphandre, pieds et mains liés, n’existe plus sans l’autre ».

 

Se pose alors la question de la mort par délégation (aide à mourir, suicide assisté, médicalement ou non) et celle du regard que la société est capable de porter sur elle- même. On comprend dès lors que « la question de l’euthanasie est profondément une question politique, au sens grec du terme : la polis organise la vie de la Cité, elle fait de nous des citoyens, c’est-à-dire des acteurs, et des cocitoyens, ce qui engage notre responsabilité vis à vis de l’autre ».

 

Euthanasie

Bernard Debré, auteur d’un livre récent sur l’euthanasie interroge lui aussi : l’euthanasie n’est-elle pas la réponse de ceux qui sont en bonne santé pour éviter de regarder en face le spectacle de la mort des autres ? « Mais où est la vraie dignité ? Dans l’acte de tuer un vieillard déformé par la maladie ou bien dans la manière de l’accompagner jusqu’au bout, avec toute l’attention à laquelle il a droit ? » (2)

 

 

(1)Libération, 13 janvier 2004

(2) Bernard Debré, Nous t’avons tant aimé, l’euthanasie, l’impossible loi, ed. du Cherche Midi, 2004

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