Dans une tribune de Libération, Véronique Fournier, cardiologue, directrice du Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin, et Denis Berthiau, juriste, posent la question : "se pourrait-il que le débat sur l’euthanasie en France devienne celui ouvert par l’affaire de Bayonne ?" Ils affirment en effet, en se basant sur une étude réalisée par le Centre d’éthique clinique de Cochin et le sondage réalisé par l’IFOP pour Sud-Ouest en août 2011 (cf. Synthèse de presse d’août 2011) que, loin de la revendication d’une "euthanasie-liberté" consistant à ouvrir la possibilité de mettre fin à la vie d’une personne qui le demande, les Français plébiscitent "une euthanasie banale, quotidienne, confiée à une médecine en qui on a confiance, une euthanasie accordée à la toute fin d’une vie, comprise comme une libération offerte, au nom de ce qu’on appelait autrefois le "paternalisme médical", c’est-à-dire l’inverse exactement du mouvement qui a porté les législations ailleurs". Ils affirment que les personnes interrogées, toutes de plus de 75 ans, souhaitent que ce soit la médecine "qui prenne sur elle de précipiter les choses en douceur" le jour où elle n’aura plus rien à leur proposer. Elles déclarent en même temps ne pas vouloir écrire de directives anticipées dans ce sens, de peur "qu’elles servent alors de blanc-seing aux médecins pour arrêter prématurément le combat". Toutes "expriment fortement qu’elles veulent vivre, et vivre encore, résolument, quels que soient leur âge et leur état de santé, et qu’elles ne veulent pas entendre parler d’euthanasie, au sens où on l’entend usuellement d’un droit ouvert permettant d’obtenir, en tant qu’homme libre, une aide active à mourir de façon anticipée, à son heure et en toute conscience."
Une seconde tribune, du sociologue Philippe Bataille, directeur de recherche à l’EHESS, remet en cause la loi Leonetti et le développement des soins palliatifs dans l’accompagnement de la fin de vie. Il estime qu’il "n’existe pas d’offre de soins réelle, et surtout palliative, pour ceux qui rejoignent l’hôpital au seuil de leur mort." Par ailleurs, "les soins palliatifs sont d’évidence une réponse défaillante qui promeut la culture de l’agonie à laquelle n’adhèrent pas les Français qui en financent l’activité". Il dénonce enfin le "protocole Leonetti" d’arrêt de l’alimentation et l’hydratation lorsque les personnes le demandent, prônant "un accompagnement vers la fin de vie qui soit autre chose qu’une proposition d’affamer et d’assoiffer jusqu’à ce que mort s’ensuive". Se référant à l’affaire de Bayonne, il conclut : "Pour beaucoup, mieux vaut mourir aux urgences qu’au terme d’une agonie dont ils ne veulent pas"
Libération 01/09/11