Bénédicte est enceinte. Le médecin, lors de l’échographie de routine, lui a annoncé sans ménagement un diagnostic malformatif de Mayeul : une fente labio-palatine et une autre pathologie qui reste obscure. C’est le début d’un long parcours difficile semé d’embuches et qui la laisse perplexe. Témoignage (2/5).
Sur ces entrefaites, nous sommes partis en vacances. Nous avons emmené avec nous « notre fente labio-palatine », qui ne nous inquiétait pas beaucoup. Nous espérions seulement au fond de nous-même que le reste était faux.
Nouveau rendez-vous 10 jours plus tard. Nous attendons trois heures interminables en salle d’attente ! Il est six heures du soir quand le médecin nous appelle. Il veut reporter l’examen mais, compte tenu des circonstances, nous insistons. Il est entouré de trois internes. Il n’a aucun égard : « Madame, mettez-vous là ». Il commence à scruter son écran en me malmenant le ventre sans ménagement. Tout à coup, il bondit sur sa chaise : « Regardez, là ! » et il ajoute : « C’est pas bon. Votre enfant a une holoprosencéphalie. Le diagnostic est très pessimiste ». Naïve, je demande : « Et qu’est-ce qu’on fait ? ». La réponse fuse, sans équivoque : « A part arrêter la grossesse, je ne vois pas ». Avec mon mari, nous sommes sous le choc. Nous retournons la semaine suivante au CPDPN. Le même scénario implacable se déroule, la solution proposée n’a pas changé.
A ce moment-là, la terre semble se dérober sous mes pieds, mais personne ne m’a dit : « Voilà, votre enfant à cette maladie, voilà ce que ça signifie, voilà comment il va vivre »… Le médecin prescrit l’amniocentèse pour vérifier que notre bébé n’est pas porteur de trisomie 13 ou 18 puisque ces malformations se retrouve très fréquemment dans ces maladies. Dans un premier temps, nous refusons. Et puis je change d’avis, je suis bouleversée. Je convaincs mon mari pour que nous fassions ces examens. Il est sans enthousiasme. Moi, je pensais que ça pourrait nous préparer à accueillir notre bébé, surtout s’il devait mourir, mais je vais être plus que déçue.
L’amniocentèse révèle un caryotype normal. Mayeul n’est pas porteur d’anomalie chromosomique. A cette occasion, nous sommes reçus par la généticienne qui retrace nos antécédents. Elle comprend qu’il va être difficile de mettre fin à la grossesse : « Vous sentez le bébé bouger… ». Nous nous réjouissons, nous avons l’impression d’échanger enfin avec un médecin compréhensif. Elle nous propose de rencontrer les pédiatres et réanimateurs de la maternité pour préparer l’accouchement.
Ce jour là, mon mari ne peut pas venir et c’est ma belle-mère qui m’accompagne. La sempiternelle ritournelle nous suit : « C’est une maladie très grave, on ne sait pas si votre enfant va vivre. Qu’est-ce qu’on fait à la naissance si votre enfant ne respire pas ? Est-ce qu’on le réanime ? Est-ce vraiment nécessaire ?» Je ne sais pas trop quoi répondre. Je pense que tout dépendra de ce qui se passera à la naissance. Les médecins insistent : « Est-ce que vous vous rendez compte de ce que vous demandez à votre aîné ? Votre décision de le garder est très égoïste ! C’est très lourd à porter, les couples ne survivent pas au handicap ». Ma belle-mère explique qu’elle sera là pour m’aider, qu’elle a une fille porteuse de trisomie 21… La pédiatre semble déchaînée : « Mais là, le bébé n’a pas une trisomie 21, c’est mille fois plus grave ! Vous ne vous rendez pas compte ! ». Ma belle-mère fond en larmes. Nous partons très vite. A aucun moment je n’ai eu l’impression d’être comprise ou accompagnée dans notre choix par l’équipe médicale.
Retrouvez demain la suite du témoignage de Bénédicte : « L’accouchement »
Et pour relire l’épisode d’hier, c’est par ici :