Révision des lois de bioéthique : le Conseil d’Etat remet son rapport au Premier Ministre

Publié le 6 Juil, 2018

Le Conseil d’Etat doit remettre aujourd’hui son rapport sur la bioéthique au premier ministre, Edouard Philippe. Saisis par le gouvernement il y a quelques mois, les sages ont été « chargés d’examiner les conséquences juridiques d’une évolution des lois de bioéthique, notamment en matière sociétale ».

 

Dans la synthèse de ce rapport, le Conseil d’Etat ne se prononce pas explicitement pour ou contre une ouverture de la PMA aux couples de femmes et de femmes seules, mais, sans l’encourager, il ne met en évidence « aucun obstacle juridique, y compris dans le droit conventionnel, à la PMA pour toutes » (cf. Le principe constitutionnel de dignité à l’origine des lois de bioéthiques est-il en fin de vie ?).

 

Les Sages examinent plusieurs scénarios et déclinent notamment « quatre options sur l’épineuse question de la filiation pour les couples de femmes » comme l’adoption de l’enfant par la mère d’intention, très critiquée par les associations LGBT, ou encore ils évoquent la possibilité d’une « déclaration commune anticipée qui relierait directement l’enfant aux deux mères ». Cette seconde éventualité imposerait une refonte du titre 7 du code civil sur la filiation « aujourd’hui fondé sur la vérité ou la vraisemblance biologique», explique Jean-René Binet (cf. Révision de la loi de bioéthique : Le Conseil d’Etat remettra son rapport d’ici l’été ).

 

La synthèse du rapport invite cependant à ne pas toucher « aux principes de gratuité et d’anonymat du don de gamètes afin d’éviter l’émergence d’un ‘marché’ contraire à l’éthique française ». Mais il conseille une prise en charge de toutes les PMA, « même si elles ne sont pas réalisées pour des raisons médicales », au nom du principe de solidarité.

 

Concernant la procréation post-mortem, le Conseil d’Etat ne mentionne pas d’obstacles juridiques, mais considère que « l’interdit actuel serait difficile à maintenir en cas d’ouverture de la PMA aux femmes célibataires » (cf. Controversations: Conservation des ovocytes, un progrès social ? et Enquête : une femme sur six regrette d’avoir eu recours à la conservation de ses ovocytes).

 

Au sujet des enfants nés d’un don de gamètes, les sages estiment qu’il est bon de les autoriser à accéder à l’identité du donneur « si ce dernier donne son accord », dans le cas contraire, un accès aux données non identifiantes devrait être accordé (cf. Né d’un don de sperme, il retrouve son géniteur par généalogie génétique).

 

L’analyse juridique ne permet pas au Conseil d’Etat de décider de la question de l’autoconservation des ovocytes. Mais il estime important de « supprimer la possibilité d’autoconservation récemment ouverte aux donneuses d’ovocytes en échange de leur don, un marchandage critiqué de toutes parts ».

 

La question concernant l’embryon reste entière (cf. Loi de bioéthique : « L’embryon humain est la variable d’ajustement du jeu politique ») : autorisation de « l’extension de la durée de culture des embryons in vitro (…) au-delà de 7 jours et jusqu’à 14 jours après la fécondation », de « la création d’embryons transgéniques et leur transfert à des fins de gestation » ou de « la destruction des embryons surnuméraires donnés à la recherche et n’ayant pas fait l’objet de recherche » ? Sur ces enjeux aigus, le Président de la Fondation Lejeune, Jean-Marie Le Méné, rappelle que l’embryon ne peut pas être considéré comme un « rat de laboratoire ». Il demande au Gouvernement de se souvenir, au moment de l’élaboration de la loi que l’embryon est un être humain et que sa protection demeure un principe intangible fondateur de la législation bioéthique française (article 16 du Code Civil).

 

En 2009, à l’occasion de la précédente révision des lois de bioéthique, le Conseil d’Etat s’était prononcé sur le statut de l’embryon, le diagnostic préimplantatoire, l’accès aux origines et les tests génétiques. Il avait « estimé que le droit français de la bioéthique avait ‘atteint un équilibre’ » et s’était prononcé « contre le principe de la révision régulière ». Il considérait que « le principal danger en ces matières est le risque de moins-disant éthique lié à l’existence de législations concurrentes dans d’autres pays ». Il s’était alors fermement opposé « à une remise en cause des principes inscrits dans la loi et qui se veulent la traduction du primat de la dignité humaine ».

 

Le rapport doit être rendu public mercredi 11 juillet. Encore à venir, le rapport de l’Office Parlementaire des choix scientifiques et techniques (OPECST) et l’avis du Comité consultatif national d’éthique qui doit être présenté fin septembre.

Le Figaro, Anne Leclair (05/07/2018) – Bioéthique, le Conseil d’État remet son rapport à Édouard Philippe

La Croix, Loup Besmond de Senneville (05/07/2018) – Le Conseil d’État ouvre la porte à la PMA pour toutes

CP Fondation Lejeune (06/07/2018) – L’embryon humain sera-t-il la victime silencieuse de la révision de la loi de bioéthique ?

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