Les milliardaires Elon Musk et Pavel Dourov se sont donné pour mission de sauver l’humanité de sa prétendue perte. Pour cela, ils répandent leur ADN avec largesse, inséminant le plus grand nombre de femmes possible. A l’instar d’autres milliardaires de la Silicon Valley, ils mettent leur fortune et leur pouvoir d’influence au service d’un projet eugéniste.
Repeupler la Terre avec ses gènes
Elon Musk, qui serait l’homme le plus riche de l’histoire de l’Humanité, est officiellement le père de 14 enfants. Il serait par ailleurs le père biologique de nombreux autres enfants qu’il refuse de reconnaître. Selon des sources proches du milliardaire, ce dernier aurait pour habitude de séduire des jeunes femmes grâce à son réseau social X, de les faire tomber enceintes puis d’acheter leur silence.
Contrairement à Donald Trump, Elon Musk n’est pas attaché à la famille. Peu lui importe de maintenir des liens affectifs avec les enfants illégitimes qu’il cache au grand public. Les relations qu’il entretient avec ces enfants et leurs mères sont purement contractuelles et pécuniaires [1].
Ce qui lui importe est, d’une part, la natalité. En 2022, il twittait : « Je fais de mon mieux pour contribuer à résoudre la crise de la dépopulation ; la chute de la natalité est le plus grand danger auquel notre civilisation doit faire face, un danger bien plus grand que le réchauffement climatique »[2]. Il s’est prononcé à de nombreuses reprises contre la contraception et l’avortement.
D’autre part, il appelle de ses vœux une humanité « génétiquement améliorée » (cf. L’eugénisme : une pratique interdite… mais florissante). Elon Musk s’est donné pour mission de repeupler la Terre, non pas de façon incontrôlée, mais en « contribuant à l’éclosion de davantage d’êtres humains dotés d’une intelligence supérieure »[3] ; d’où l’importance d’engendrer le plus grand nombre possible d’enfants avec son sperme.
La méthode « efficace » de Pavel Dourov
Le Russe Pavel Dourov, fondateur de Telegram dont la fortune est estimée à 15,5 milliards de dollars, a quitté son pays natal pour être naturalisé français en 2021. Il a la triple nationalité russe, française et émiratie. Pavel Dourov a trouvé un moyen bien plus efficace de poursuivre le but d’une humanité régénérée. Ce génie des mathématiques a eu 5 enfants avec deux anciennes compagnes, et par ailleurs il est le père biologique de… 100 enfants dans 12 pays, grâce à des dons de sperme qui ont abouti à des grossesses au cours des 15 dernières années. Le milliardaire a tout d’abord donné son sperme à AltraVita, une clinique de procréation médicalement assistée russe pour aider un ami infertile. C’est alors que le fondateur de la clinique l’a sollicité en tant que « donneur d’un sperme de qualité supérieur » afin qu’il soit donneur régulier. Pavel Dourov ne réalise plus de don depuis plusieurs années, mais AltraVita propose toujours ce service, le sperme du « génie » ayant été congelé [4].
Depuis novembre 2024, Pavel Dourov propose de prendre en charge les frais liés à la fécondation in vitro pour les femmes de moins de 38 ans, à condition qu’elles soient inséminées avec son sperme. AltraVita annonce sur la page d’accueil de son site web : « Nous vous offrons une FIV gratuite, avec le sperme de Pavel Dourov, l’un des plus grands entrepreneurs à succès de notre temps »[5].
Le « pro-natalisme », pour une humanité nombreuse et « améliorée »
Les deux hommes font partie des représentants du pro-natalisme, un mouvement de pensée qui s’est développé dans la Silicon Valley et Austin, au Texas, où se concentrent les activités les plus pointues en termes de nouvelles technologies.
A l’origine de la Fondation Pronatalist (dont le budget n’est pas révélé), le couple d’investisseurs Malcom et Simone Collins a prévu d’avoir une dizaine d’enfants ; puis chacun d’eux aura 8 enfants, et ainsi de suite. Il s’agit, au fil des générations, de « définir l’avenir de l’espèce humaine ». Une espèce humaine en bonne santé, en ayant recours au tri d’embryon par les entreprises Genomic Prediction et SelfDecode [6]. Mais pas seulement : Simone est actuellement enceinte du « premier bébé sélectionné pour son intelligence »[7] (cf. « Une start-up américaine propose de trier les embryons en fonction de leur QI »).
L’« amélioration de la race humaine » est un projet ancien. Après le traumatisme collectif lié au nazisme, ce projet de société revient sous une forme qui se veut acceptable : il s’agirait simplement d’engendrer en plus grand nombre des personnes « de qualité supérieure ».
Dans leur défense du pro-natalisme, les époux Collins se désolidarisent explicitement des campagnes d’eugénisme qui ont eu cours au XXe siècle : « Nous sommes strictement opposés aux politiques de contrôle autoritaire de la population. Nous condamnons la coercition violente » (cf. Avis du CCNE : « L’eugénisme n’a plus besoin de coercition »). Ils tiennent à mettre en avant la liberté individuelle des parents : « Nous mettons des ressources à la disposition de toute personne qui souhaite devenir parent »[8].
Ils rejettent en outre toute idée de racisme ou d’homogénéisation culturelle : « Quiconque connaît la “famine de la pomme de terre” en Irlande sait le risque qui accompagne toute monoculture »[9].
Le business rentable de l’eugénisme
Les époux Collins sont des investisseurs, et la « natalité sélective » est justement au cœur d’un éco-système entrepreneurial florissant. Déclarer vouloir « rendre la parentalité possible pour tous » correspond à l’ouverture d’esprit qui est censée prévaloir sur la côte ouest, et offre des débouchés commerciaux au « business de la procréation »[10] (cf. PMA : la procréation attire les fonds d’investissement). Malcom et Simone Collins investissent des capitaux dans des cliniques qui mettent à profit des technologies de pointe en matière de diagnostic pré-implantatoire, ainsi que dans la recherche sur la création d’utérus artificiels. Ils s’engagent pour la suppression de tout encadrement législatif de la gestation pour autrui.
Aux Etats-Unis comme en Europe, l’Etat n’impose plus ses politiques eugénistes par la loi, il lui suffit de tolérer l’eugénisme libéral porté par les intérêts privés (cf. « Est-ce la sélection des vies qui fait l’eugénisme ou la violence de cette sélection ? »).
[1] Elizabeth Bruenig, “The Harem of Elon Musk”, The Atlantic, 18 avril 2025
[2] Sara Ashley O’Brien, “Elon Musk reportedly had twins with a Neuralink executive”, CNN, 7 juillet 2022
[3] Solène Delinger, « Elon Musk aurait recruté des femmes sur X pour créer une «légion» d’enfants », Europe 1, 18 avril 2025
[4] TOI Tech desk, “Telegram CEO Pavel Durov with more than 100 children is offering free IVF for women ; here are the terms and conditions”, 12 novembre 2024
[5] Mary Whitfill Roeloffs, “Billionaire Pavel Durov Offering Free IVF To Women Willing To Have His Baby”, Forbes, 12 novembre 2024
[6] Marine Protais, « Les millionaires de la tech veulent sauver la planète grâce à leurs bébés », L’ADN, 30 novembre 2022
[7] Raphaelle Besse Desmoulières, « Ces Américains en croisade pour faire le plus d’enfants possible, et sauver l’humanité », Le Monde, 29 octobre 2023
[9] Raphaelle Besse Desmoulières, ibid.
[10] Voir les travaux de la journaliste d’investigation Jennifer Bilek sur le site « The 11th hour blog »
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