Pascal Clément, garde des Sceaux a présenté hier, lundi 4 juillet, une réforme du code civil. Il s’agit d’abroger la distinction formelle entre enfants légitimes et naturels, permettant ainsi de supprimer la moitié des articles concernant la filiation dans le code civil.
Rappelons que cette distinction s’était déjà fortement atténuée, puisque depuis 1972, le code civil proclame que les enfants adultérins «ont les mêmes droits et les mêmes devoirs dans leurs rapports avec leur père et leur mère. Ils entrent dans la famille de chacun d’eux», qu’en 2001 les droits de succession sont devenus les mêmes pour les enfants des deux origines, et qu’en 2002 l’autorité parentale était attribuée de manière identique au père marié et à celui qui déclarait son enfant avant un an. «Il ne subsiste aujourd’hui qu’une différence terminologique dont la signification est la seule trace d’une hiérarchie désormais abolie» souligne le rapport au président de la République. Cette réforme permettra aussi à la femme non marié de ne plus être obligée de reconnaître son enfant à la naissance, cela deviendra automatique.
Pour Françoise Dekeuwer-Défossez, doyen de la faculté de droit Lille-II, le code civil napoléonien instituait le mariage comme «une structure contraignante pour la femme, dont l’adultère était interdit, et pour le mari, qui était obligé d’élever les enfants de sa femme. […] Ce système est apparu progressivement comme de plus en plus injuste. Il y a eu d’abord un mouvement de libération dans les couples, qui s’est manifesté par la création du divorce, en 1884, mais aussi une incompréhension grandissante face à cette hiérarchie entre les enfants légitimes et naturels. […] les lois ont considéré peu à peu que l’enfant était innocent des conditions de sa naissance et pris acte du fait que l’opprobre attaché à certains comportements comme l’adultère était moins fort.» Mais, selon elle, la réforme ne va pas assez loin car «les nouveaux textes continuent à ignorer les droits de l’enfant lorsque les comportements des parents ont été par trop contraires à l’ordre public : les enfants incestueux et ceux des mères porteuses restent toujours "hors la loi".»
La Confédération des associations familiales catholiques a regretté hier que le recours à l’ordonnance pour voter cette réforme «prive la société française de débat parlementaire sur un sujet de cette importance". Pour le président de la Confédération, Paul de Viguerie : «Le mariage demeure la seule institution qui garantisse d’avoir un père et une mère. La réforme fragilise la situation de l’enfant, alors qu’elle prétend la renforcer.» L’Union des familles laïques, a, au contraire, salué «un grand pas en avant».
Le Monde (Anne Chemin) 05/07/05 – Le Figaro (Delphine Chayet) 05/07/05 – Libération (Julie Lasterade) 05/07/05