Projet de Loi Bioéthique : “Sans un sursaut de démocratie, c’est l’humain même qui est menacé”

Publié le 20 Jan, 2020

Dans une tribune accordée à Libération, le Professeur Philippe Meirieu[1]et la formatrice en bioéthique Hélène Le Gardeur regrettent que le débat sur la PMA pour toutes occulte les autres propositions du projet de la loi bioéthique qu’ils estiment autrement plus dangereuses.

 

Ils regrettent que certains sujets d’ampleur tels que l’autorisation d’implanter des « embryons  humains dans un animal à des fins de gestation » ou encore celle de créer des « embryons transgéniques ou chimériques » soient si peu discutées. Ils considèrent qu’avec « la possibilité de ‘fabriquer’ des enfants en manipulant les données génétiques selon notre bon vouloir », ce projet de loi « change radicalement le rapport anthropologique de l’humain à la procréation ».

 

Ils s’inquiètent également de la proposition faite aux femmes de congeler leurs ovocytes pour officiellement « choisir le moment de leur grossesse ». En réalité, cette option pourrait n’avoir d’autre objectif que d’« améliorer la «performance» des femmes au travail » et  d’ouvrir « la porte à leurs employeurs pour qu’ils décident à leur place de leur maternité ».

 

Ils dénoncent encore l’organisation à moyen terme « d’un véritable marché des spermatozoïdes où les officines privées feront sans doute miroiter, moyennant finance, des enfants de meilleure qualité ».

 

Finalement, « comment ne pas voir qu’il s’agit là, tout simplement, de la marchandisation du vivant ? (…) Comment ne pas s’inquiéter des risques d’eugénisme que font courir les techniques légitimées par cette loi : à quand l’élimination systématique des embryons qui ne correspondraient pas exactement à nos vœux ? Et comment ne pas imaginer que nous ouvrons la porte, grâce au recueil systématique des données génétiques (auquel la loi fait référence à de nombreuses reprises), à la mise en place de fichiers dont l’usage par un pouvoir politique ou par des «industries de l’humain» pourrait s’avérer terrifiant ? »

 

Les auteurs concluent : « Décidément, cette loi dite de «bioéthique» n’est «ni faite ni à faire». Ils estiment que « le débat sur la bioéthique a été confisqué. Les entreprises et laboratoires de biotechnologie y trouveront leur compte. Mais, sans un sursaut de démocratie, c’est l’humain même, dans sa précieuse spécificité, qui est menacé ».



[1] Professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université Lumière-Lyon II.

 

Libération, (19/01/2020)

 

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