C’est hier à 15h30 que les sénateurs ont procédé au vote solennel du projet de loi bioéthique au terme de deux semaines de débats dans l’hémicycle.
Par 153 voix contre 143 (voir le scrutin en cliquant ici), les sages du palais du Luxembourg ont adopté le texte, remanié par 137 amendements adoptés lors des débats.
Si le texte comporte encore de nombreuses transgressions : chosification de l’embryon humain dans le cadre de la recherche, conservation de l’embryon jusqu’à 21 jours, création de gamètes artificiels et de modèles embryonnaires, banalisation de l’interruption médicale de grossesse etc., les sénateurs en ont supprimé quelques-unes et non des moindres. Ont été retirés du projet de loi : la sélection accrue des embryons en éprouvette sur leurs caractéristiques chromosomiques (DPI-A), la création d’embryons transgéniques et chimériques ou encore l’autoconservation des gamètes, le remboursement de la PMA sans père etc. L’infographie Gènéthique permet de comprendre en un coup d’œil le texte remanié adopté par les sénateurs.
Les explications de vote qui ont précédé le vote des sénateurs ont été sans surprise. On peut noter l’intervention du centriste Jean-Marie Mizzon qui a manifesté son désaccord avec un texte qui, explique-t-il, « porte atteinte aux principes fondamentaux de la dignité humaine ; les enfants naissent d’êtres humains et doivent rester des êtres humains avec leur beauté et leurs imperfections ». Laurence Cohen (CRC) a, quant à elle, insisté sur l’enjeu de la modification du génome qui est un sujet « à ne pas prendre à la légère », se félicitant en creux de l’interdit de créer des embryons transgéniques posé par les sénateurs. Cependant, Véronique Guillotin (RDSE), Jacques Bigot (Socialiste), Daniel Chasseing (Les Indépendants) ou encore Mohamed Soilihi (LREM) se sont prononcés en faveur du texte tout en regrettant les restrictions posées sur la PMA, le rejet du DPI-A, des chimères, ou encore le fait que le texte ne « suive pas les progrès de la génétique ». Ils espèrent « une plus grande ouverture », et « de meilleurs sentiments » lors de la 2ème lecture pour aller au-delà.
Agnès Buzyn a clos la séance en rappelant que ce texte « ne devait mettre en tension aucun des principes fondamentaux » de la bioéthique. Ce qui l’a conduite à rejeter les tests génétiques adoptés en commission spéciale. Elle souligne les nombreuses modifications du texte, notamment concernant la partie recherche. Elle précise sur ce point : « Je ne doute pas que les prochains débats resteront denses en deuxième lecture ». Elle précise enfin qu’elle soutiendra la réintégration des articles 3 et 4 sur l’accès de l’identité du donneur ou la filiation établie à l’égard de deux mères tels que l’Assemblée nationale les avait rédigés. Une mise au point qui montre combien les débats bioéthiques sont loin d’être achevés et que les quelques barrières éthiques préservées par les sénateurs ne tiennent qu’à un fil. Elles pourraient être balayées en 2ème lecture par l’Assemblée nationale.
Le texte voté en 1ère lecture par le Sénat va maintenant poursuivre sa « navette ». Le texte amendé par le Sénat sera probablement examiné au mois d’avril par l’Assemblée nationale.
Pour consulter le texte bioéthique voté par les sénateurs (n°55) en cliquant ici
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