“PMA pour toutes” : Être parent à tout prix relève d’un “fantasme de toute-puissance”

Publié le 15 Sep, 2017

L’ouverture de la « PMA pour toutes » qui doit être proposée par le gouvernement en 2018, suscite de nombreuses réactions.

 

« Désormais, cela sera éthique de procéder à la naissance d’un enfant dont l’identité du géniteur sera effacée. On vit un véritable basculement de l’humanité », explique Frigide Barjot, ancienne porte-parole de la Manif pour tous, désormais déléguée générale de l’Avenir pour Tous.

 

Pour Nathalie Heinich, sociologue et chercheur au CNRS, les arguments d’égalité avancés pour justifier cet élargissement ne tiennent pas (cf. « PMA pour toutes » : l’argumentaire de Marlène Schiappa décodé) : « La valeur de protection de l’intérêt des enfants devrait avoir au moins autant sa place, dans cette histoire, que la valeur d’égalité, dont j’ai montré ailleurs qu’elle est sujette à une extension souvent démesurée, aboutissant à des aberrations juridiques, voire morales ».

 

Elle dénonce de même l’existence d’un « droit à l’enfant », car « ôter à un enfant la moitié de sa généalogie, c’est bien lui enlever quelque chose – et quelque chose de fondamental! S’obstiner à ne pas le voir, en dépit de l’évidence, dénote l’hypocrisie de l’argument de ‘l’amour’ pour l’enfant (…) Comme disait le psychiatre Winnicott, ce n’est pas d’amour qu’un enfant a besoin, mais de parents ! ».

 

Être parent à tout prix relève d’un « fantasme de toute-puissance » : « Comme si l’on vivait aujourd’hui, après le règne de l’enfant-roi, le règne des ex-enfants-rois devenus adultes, c’est-à-dire parents-rois : je veux un enfant, donc personne n’a le droit de m’en priver ».

 

Or, comme l’exprime à son tour le philosophe Yvon Quiniou : « Il n’y a pas de droit à l’enfant que l’on pourrait inscrire dans une nouvelle déclaration juridique et que l’on devrait faire appliquer par n’importe quels moyens, comme on fait appliquer le droit à l’égalité : le désir, y compris celui d’avoir un enfant, ne fait pas droit ! » Il ajoute : « Le besoin de connaître son origine biologique comme celui de pouvoir s’attacher à une figure paternelle sont des besoins humains parfaitement légitimes sur le plan affectif et qui sont structurants dans la construction de la personnalité comme je l’ai indiqué plus haut. L’on sait d’ailleurs que leur insatisfaction, comme dans le cas de certaines adoptions d’enfant par une femme seule, produisent des carences qui sont souvent difficiles à combler ou à gérer ».

 

La sociologue quant à elle souligne que « le problème n’est pas celui de la parenté ‘naturelle’, c’est-à-dire génétique ; il n’est pas non plus celui de la parenté d’éducation, (…) ; le problème est celui de la parenté symbolique, c’est-à-dire la possibilité pour l’enfant de se penser à la fois dans une continuité généalogique et dans la différence des sexes, fondatrice de la conscience qu’il y a de l’autre, et que cette altérité est au cœur de la vie sociale ».

 

Pourquoi, dans ces conditions,  fabriquer de toutes pièces des situations dont les conséquences psychiques sont connues et qui s’avèrent dramatiques ?  

 

Enfin, Frigide Barjot estime que « c’est une loi bioéthique qui suit une logique de remplacement des êtres humains. Cette loi va nous amener peu à peu vers la GPA, qui n’est qu’une forme de PMA. La procréation marchande et anonyme sera tolérée et cela est inacceptable ».

 

Médiapart, Yvon Quiniou (14/09/2017) ; Le Figro, Eugénie Bastié (15/09/2017) : Valeurs Actuelles, Louis Rigaudière (12/09/2017)

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