Philosophe et directeur de recherche au CNRS, Ruwen Ogien répond, dans Le Monde, à la tribune de Caroline Eliacheff et René Frydman dans laquelle ils s’opposaient à la pratique des mères porteuses (cf. Synthèse de presse du 01/07/08). Après avoir rappelé que, selon le droit français, la mère est celle qui a accouché, Caroline Eliacheff et René Frydman insistaient sur les nombreux problèmes qui pouvaient se poser au cours d’un tel processus. Pour eux, "fondée sur l’obsession de faire un enfant génétiquement de soi", "la souffrance des parents infertiles ne devrait pas peser".
Ruwen Ogien propose de s’appuyer sur des études américaines selon lesquelles il ne faudrait pas voir la gestation pour autrui "seulement sous l’angle des problèmes qu’elle pourrait poser à la mère porteuse, mais aussi des bénéfices psychologiques et moraux qu’elle pourrait tirer d’un acte qui est souvent réfléchi et qui reste généreux même lorsqu’il est rétribué".
Et, poursuit-il, les risques évoqués ci-dessus, "justifient-ils qu’on protège ces personnes d’elles-mêmes, par la menace ou la force, comme c’est le cas en France où les arrangements dont le but est de faire porter un enfant par une personne qui n’en sera pas la mère sont illégaux et sanctionnés par des amendes ou l’emprisonnement lorsqu’"’ils sont établis ?". Pour Ruwen Ogien, il devrait appartenir aux personnes concernées de décider librement de participer à ce processus.
Toujours au nom de cette liberté, le philosophe va plus loin en plaidant déjà pour que cette pratique soit accessible à tous : "serait-il scandaleux que les citoyens décident par eux-mêmes si l’arrangement doit être gratuit ou pas et si on peut envisager de recourir à cet arrangement même quand on ne fait pas partie d’un couple hétérosexuel ?".
Le Monde (Ruwen Ogien) 04/07/08