Maisons d’accompagnement : le but lucratif est écarté, pas l’« aide à mourir »

10 Avr, 2025

Après le sujet de la formation des soignants (cf. « Aide à mourir » vs. « aide active à mourir » : l’euthanasie se glisse dans la proposition de loi sur les soins palliatifs), les maisons d’accompagnement ont fourni aux promoteurs de l’euthanasie une deuxième occasion d’insérer la question de l’« aide à mourir » dans la proposition de loi relative, en théorie, aux seuls soins palliatifs. Les députés sont assidus en Commission des Affaires sociales jeudi 10 avril et les échanges sont parfois vifs.

Un autre « cheval de Troie »

Le débat commence avec un amendement de suppression déposé par Patrick Hetzel (Droite républicaine), qui s’étonne de l’absence de phase d’expérimentation sur ces maisons d’accompagnement, ce qui aurait été plus prudent.

Christophe Bentz (Rassemblement national) soutient cet amendement de suppression. Il affirme en effet que cet article est le « cheval de Troie du 2e texte », ce qui lui vaut d’être hué par certains de ses collègues. Le député se dit opposé à l’article 10 tant qu’il n’y a pas de garanties que n’y seront pas pratiquées des « aides à mourir ». Il est rejoint par Justine Gruet (Droite républicaine) qui réclame que ces maisons ne soient pas tenues par des associations militantes et souhaite qu’il « soit écrit noir sur blanc que l’aide à mourir n’y sera pas pratiquée ». Elle déposera plusieurs amendements à cette fin qui seront tous rejetés.

Le refus d’une possible clause d’établissement

Olivier Falorni (Les Démocrates), rapporteur du texte relatif à l’« aide à mourir », défend l’idée que les maisons d’accompagnement sont le nouveau domicile du patient. Sans en faire des « maisons d’aide à mourir », « il ne saurait y avoir empêchement, entrave, à ce qu’on y pratique des aides à mourir », considère-t-il. Jean-François Rousset (Ensemble pour la République) le rejoint car il serait hors de question de déplacer des personnes de ces maisons si elles souhaitent le « dernier service » qu’est l’« aide à mourir ». « Vous êtes en train de déshumaniser la procédure », s’oppose également Hadrien Clouet (La France insoumise – Nouveau Front Populaire), qui veut lui aussi qu’il soit possible d’y pratiquer des euthanasies.

Le rapporteur Olivier Falorni poursuit : la clause de conscience ne saurait être qu’individuelle, il ne saurait y avoir de clause de conscience d’établissement : « les murs n’ont pas de conscience ».

Il existe pourtant des projets d’établissement, objecte Thibault Bazin (Droite Républicaine). Et le code de la santé publique prévoit bien des clauses d’établissement, en matière d’interruption volontaire de grossesse, ajoute Philippe Juvin (Droite Républicaine). Des arguments factuels qui ne seront pas entendus.

A l’issue des échanges, Patrick Hetzel retire son amendement, car il ne s’agit pas d’empêcher les débats. Mais il s’interroge toutefois sur l’intégration des maisons d’accompagnement dans l’offre de soins palliatifs.

Le refus d’une potentielle visée lucrative

Après l’adoption de l’amendement (AS328) de Yannick Monnet (Gauche Démocrate et Républicaine) qui précise que les maisons d’accompagnement sont « également un lieu de répit temporaire pour les aidants afin de lutter contre leur épuisement dans l’accompagnement des fins de vie », la question de l’ouverture aux structures à but lucratif est abordée.

La rapporteur François Gernigon (Horizons et Indépendants) y est personnellement favorable mais il rencontre une vive opposition au sein des différents groupes. Les « abus » constatés dans les Ehpads et les crèches privées sont évoqués par Philippe Vigier (Les Démocrates) quand François Gernigon affirme qu’aujourd’hui 25% des soins palliatifs sont assurés par le secteur lucratif. Le président de la commission, Frédéric Valletoux (Horizons et Indépendants), mentionne un rapport sénatorial qui fait le constat de « l’extrême financiarisation de notre système de santé ». Etant donné le public concerné qui est « extrêmement fragile », il explique qu’il serait rassuré si le but lucratif était exclu, au moins pendant la phase d’installation de ces structures.

Le rapporteur n’aura pas gain de cause et l’article 10 est adopté, en écartant une éventuelle visée lucrative des maisons d’accompagnement.

A 17h, les députés avaient examiné les deux tiers des amendements et voté la moitié du texte relatif aux soins palliatifs. Ils avaient aussi permis que, mine de rien, l’« aide à mourir » soit prévue dans un texte qui devait pourtant ne parler que de soin.

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