Lois de bioéthique : le texte de l’Assemblée passe au Sénat

Publié le 1 Déc, 2002

Dans le cadre de l’examen des lois de bioéthique des 29 et 30 janvier 2003 au Sénat, N. About et F. Giraud, président et rapporteur de la Commission des affaires sociales, ont entamé le 4 décembre les auditions de médecins, chercheurs, représentants des religions, et conseillers de la Grande Loge et du Grand Orient. Afin d’en mesurer l’enjeu nous vous proposons ici un parallèle entre le texte voté en première lecture à l’Assemblée nationale en janvier 2002 et l’audition au Sénat de J.F. Mattéi, ministre de la Santé. La recherche sur l’embryon est la clef du débat : recherche sur les embryons surnuméraires, création d’embryons pour la recherche, clonage….

 

Projet de loi adopté à l’Assemblée nationale en première lecture le 22 janvier 2002

 

Autoriser la recherche sur l’embryon

Le texte prévoit d’autoriser la recherche sur les embryons  surnuméraires actuellement congelés, (article L.2151-3), « ayant fait l’objet d’un abandon du projet parental et dépourvus de couples d’accueil ».

 

Autoriser la création d’embryons pour la recherche

Ce n’est pas seulement la recherche sur l’embryon surnuméraire qui a été autorisée mais aussi la conception d’embryons en vue de la recherche, comme en dispose l’article L.2151-2 : « La conception in vitro d’embryons humains à des fins de recherche est interdite, sans préjudice des dispositions prévues à l’article L.2141-1 ». Mais l’article L.2141-1, qui traite de l’évaluation des nouvelles techniques d’AMP, se termine ainsi : « A l’issue du processus d’évaluation, les embryons dont la conception résulterait de cette évaluation ne peuvent être ni conservés, ni transférés, ni entrer dans le cadre d’un projet de recherche au titre de l’article L2151-3 ». Ainsi,  si la conception in vitro d’embryons humains à des fins de recherche est déclarée interdite, on autorise néanmoins la création d’embryons pour évaluer de nouvelles techniques de procréation médicalement assistée.

 

Le rejet du clonage

« Est interdite toute pratique ayant pour but de faire naître un enfant ou se développer un embryon qui ne seraient pas directement issus des gamètes d’un homme et d’une femme ». Se trouve ainsi posée l’interdiction du clonage reproductif, voire du clonage dit thérapeutique.

 

L’ouverture au clonage 

La rédaction de l’article 15 n’est pas inintéressante. L’interdiction proposée viserait « toute intervention » ayant pour finalité la naissance d’un enfant ou le développement d’un embryon, sans préciser la nature de celle-ci. Il s’agirait donc de tous les actes qui rendraient possible cette naissance ou qui permettraient que se développe un embryon, que ce soit in vitro ou in vivo.  Au cours des débats du 17 janvier, un amendement 74 a été présenté afin de prohiber plus explicitement encore la conception d’embryons issus de cette technique. Mais l’amendement 74 a été retiré par le rapporteur de l’époque, avant d’être repris par le député, M. Mattéi, et finalement rejeté. La rédaction adoptée est donc celle qui interdit seulement le « développement » d’un embryon issu du clonage. Les articles 21 et 22 ne répriment eux aussi, que le « développement » d’un embryon humain issu du clonage. En conséquence, la loi n’interdit pas stricto sensu de conce-voir un embryon, c’est à dire de mettre au point la technique du clonage, sans développement ultérieur de l’embryon.

 

Audition au Sénat (1) de J.F. Mattéi  le 12 décembre 2002

 

Autoriser la recherche sur l’embryon 

Le ministre de la Santé ne souhaite pas revenir sur le principe fixé par l’article 16 du code civil qui « garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ». Il a considéré que l’embryon ne pouvait être objet d’étude que si l’on respectait son intégrité et si les recherches étaient menées dans son intérêt.

 

Affirmant que la médecine avait toujours progressé par transgressions successives, il a aussi admis que des recherches pourraient être menées sur des embryons in vitro conçus dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation (AMP) et pour lesquels il n’existe plus de “projet parental”. Le « bien-fondé » de cette recherche serait réexaminé au bout de cinq ans.  Il a expliqué que les perspectives thérapeutiques des cellules souches embryonnaires apparaissaient encore lointaines mais a jugé indispensable de mener de front des recherches sur les cellules embryonnaires et sur les cellules adultes, la France devant se distinguer par un engagement important dans la recherche sur les cellules souches adultes.

 

Refuser la création d’embryons pour la recherche

La création d’embryons humains à des fins de recherche devrait demeurer fermement exclue et sévèrement sanctionnée. J.F. Mattéi a jugé que la possibilité, introduite par l’Assemblée nationale, que des embryons soient créés pour l’évaluation de nouvelles techniques d’AMP était inacceptable et d’ailleurs contraire à l’article 18 de la Convention d’Oviedo.

 

Le rejet du clonage

 

J.-F. Mattei rejette le clonage thérapeutique qu’il qualifie de «porte ouverte au clonage reproductif ». Afin d’empêcher toute tentation de clonage reproductif, il souhaite la création, dans le code pénal, d’une nouvelle incrimination, baptisée « crime contre la dignité de la personne humaine », qui viserait le clonage à but reproductif et les pratiques eugéniques tendant à l’organisation de la sélection des personnes 

 

Brevets d’éléments du corps humain,

Jean-François Mattei a expliqué que la France, pour respecter les dispositions de l’article 5 de la directive européenne 98-44/CE, devait trouver une formulation juridique empêchant qu’un brevet puisse interdire aux chercheurs de mener des recherches concernant des applications nouvelles sur des molécules, gènes ou autres éléments du corps humain qui seraient déjà couverts par un brevet. 

 

Ref : 1 – Communiqué du Sénat concernant l’audition de M. Mattéi, sur le projet de loi n°189 (2001-2002) relatif à la bioéthique.

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