L’IVG revient au Parlement à l’occasion du projet de loi santé

Publié le 27 Mar, 2015
Plusieurs dispositions du projet de loi santé, qui sera débattu en séance publique à l’Assemblée nationale à partir de la semaine prochaine, poursuivent la banalisation de l’avortement. L’examen en commission des Affaires sociales a été l’occasion, pour les promoteurs de l’avortement, de voter par amendements des dispositions allant plus loin que le texte gouvernemental, comme la suppression du délai de réflexion.

 

Pour clarifier la situation sur ces évolutions, celles déjà votées, et celles qui peuvent l’être dans les jours à venir, Gènéthique a réalisé une infographie.

 

1) Ce qui a été voté en commission des Affaires sociales

 

Après son passage en commission, le projet de loi contient les dispositions suivantes:

 

  • La délivrance de la pilule du lendemain par les infirmiers scolaires du second degré, et sans conditions restrictives (article 3)
Cette disposition rend la pilule du lendemain disponible aux mineures dans leur lycée. Elle laisse penser que les effets sont anodins. Pourtant, cette pilule est potentiellement abortive. D’autre part, elle présente des caractéristiques qui rendent nécessaires une prescription et un suivi médical[1], et elle donne lieu à des effets indésirables.
 
  • Les infirmiers scolaires du second degré pourront orienter les élèves vers un centre de planification ou d’éducation familiale (CPEF) (article 3)
Cette disposition est justifiée par la volonté de “promouvoir la santé reproductive et sexuelle de la mineure” (Cf. Amendement  du rapporteur M. Véran).
 
  • La suppression du délai de réflexion avant une IVG (après l’article 17)
Cette disposition a été votée par voie d’amendement. Un avortement pourra être demandé et réalisé dans la précipitation (3 jours). Les promoteurs de cette mesure ont invoqué l’“infantilisation” de la femme quand celle-ci doit prendre un temps de réflexion. Cette approche a été contestée (Cf. Synthèse Gènéthique du 20 mars 2015) car la réalité est autre : ce n’est pas l’intérêt de la femme de devoir prendre une telle décision sans prise de recul, sauf à croire qu’un avortement est un acte anodin et sans conséquence.
 
  • Les sages-femmes pourront pratiquer l’IVG médicamenteuse (article 31)
Cette disposition traduit une nécessité de trouver d’autres professionnels de santé pour compenser la baisse du nombre des médecins susceptibles de prendre en charge les IVG. Dans les faits, il s’agit de faire face au départ à la retraite de la génération des médecins militants car les nouvelles générations ne sont pas intéressées pour pratiquer cet acte (cf. Rapport relatif à l’accès à l’IVG du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, p.59). 
 
2) Ce qui sera probablement voté en séance publique

 

Lors de la présentation de son Programme national d’action pour améliorer l’accès à l’IVG en janvier dernier (Cf. Synthèse Gènéthique du 19 janvier 2015), la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a annoncé son intention de présenter un amendement gouvernemental au projet de loi Santé. Cet amendement consiste à autoriser la pratique de l’IVG instrumentale dans les centres de santé par des médecins. Les centres de santé sont des lieux de proximité où des professionnels de santé réalisent des soins « primaires ».
 
Par ailleurs, lors des discussions en commission des Affaires sociales, un amendement n’a pas été discuté. Il est “tombé” suite à la réécriture d’articles, dont l’article 38 auquel cet amendement était rattaché. Il est donc probable qu’il soit représenté  en séance et adopté. Il concerne l’obligation pour chaque Agence régionale de santé (ARS) d’élaborer un plan national d’action qui doit inscrire l’activité d’IVG dans le contrat d’objectifs et de moyens qui la lie aux établissements de santé. Cette disposition fait partie du Programme national d’action IVG lancé par Marisol Touraine.
 
3) Ce qui pourrait être voté en séance
 

L’infographie ci-joint met au jour également certaines mesures qui feront probablement l’objet d’un débat en séance mais dont le vote est moins assuré que les mesures précédentes. Il s’agit essentiellement des recommandations de la Délégation aux droits des femmes présentes dans le rapport transmis à Marisol Touraine (Cf. Synthèse Gènéthique du 19 février 2015). Ces recommandations sont régulièrement rappelées au gouvernement : elles figuraient dans le Rapport relatif à l’accès à l’IVG, publié en novembre 2013 (Cf. Synthèse Gènéthique du 8 novembre 2013).

 
Parmi ces recommandations, on retrouve la possibilité de permettre la pratique de l’IVG instrumentale (chirurgicale), non seulement dans les centres de santé, mais aussi dans les centres de planification et d’éducation familiale ainsi que dans les maisons de santé pluridisciplinaires. Il est également recommandé, que l’IVG instrumentale pratiquée en ces lieux dits de “proximité”, le soit non seulement pas des médecins mais aussi par des sages-femmes. Dans son communiqué de presse du 20 février 2015, l’ordre national des sages-femmes a déclaré “notre instance s’étonne que l’on envisage de permettre aux sages-femmes de pratiquer l’IVG instrumentale, un acte chirurgical”. Il s’inscrit en faux également contre l’idée de supprimer la clause de conscience liée à l’acte d’IVG.
 
La suppression de la clause de conscience des médecins, dont l’amendement a été retiré en commission (Cf. Synthèse Gènéthique du 19 mars 2015), pourrait tout de même être à nouveau abordée en séance.
 
Une réforme précipitée à suivre de très près

 

A partir du 31 mars et jusqu’au 10 avril, le projet de loi santé sera donc débattu en séance à l’Assemblée nationale. En raison de l’urgence déclarée sur ce texte, une seule lecture est programmée par chambre pour les 57 articles.

 

Le délai de réflexion est non seulement supprimé pour les femmes, mais donc aussi pour les responsables politiques. 
 
[1]Cf. article 71 du code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.

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