Dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique, les Commissions des lois et des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale ont lancé une série d’auditions pour se préparer aux débats à venir (cf. Lancement d’un cycle d’auditions communes aux commissions des lois et des affaires sociales et Révision des lois de bioéthique : la dignité de la personne humaine, un principe juridique fondamental). Mercredi 6 juin, c’était au tour du professeur Hervé Chneiweiss, neurologue, directeur de recherche au CNRS et président du comité d’éthique de l’Inserm, et de Christian Byk, conseiller à la cour d’appel de Paris, président du Comité intergouvernemental de bioéthique de l’UNESCO, d’être entendus par les députés.
Les neurosciences sont définies par Brigitte Bourguignon, présidente la commission des affaires sociales, comme l’étude de la structure et du fonctionnement du système nerveux. Le Pr Hervé Chneiweiss, distinguent les technologies invasives et non invasives qui en découlent. Il note que ce n’est pas parce qu’elles sont non invasives que les neurosciences ne peuvent pas avoir d’impact sur la personnalité de l’individu. Il prend l’exemple de la maladie de Parkinson qui peut être prise en charge par l’implantation d’un dispositif de stimulation à hautes fréquences. Ces implants cérébraux qui régulent les tremblements ont des effets possibles sur l’humeur et la personnalité des patients. Les malades doivent être non seulement informés des difficultés techniques, mais également de ces effets secondaires. Et il interroge : le consentement des personnes est-il vraiment éclairé ?
Les neurosciences semblent être en pleine expansion même si nous ignorons encore beaucoup de choses. Ainsi mettre aujourd’hui des limites semble indispensable. Pour cela, la question de la finalité est essentielle. Partant d’une finalité médicale, les neurosciences pourraient s’ouvrir à d’autres domaines d’application comme par exemple l’éducation, le marketing, ou encore la justice.
Cependant, même dans le domaine médical, les questionnements sont multiples. L’anonymisation des données n’est déjà plus possible. Si les données ne sont plus protégées, il faut alors protéger les individus en s’opposant à leur mésusage.
De plus, comme le souligne Christian Byk, la technique va-t-elle permettre de dégager réellement du temps au médecin pour améliorer la relation patient/médecin ou bien conduira-t-elle à techniciser davantage le rôle du médecin de plus en plus dépendant de la technologie pour des analyses et des diagnostics ?
Et enfin, comme le rappelle le Professeur Chneiweiss, les neurosciences permettent une aide aux personnes vulnérables voire dépendantes, mais il ne faudrait pas qu’elles se substituent à l’interaction avec la personne humaine pour « qu’on ne transforme pas un monde humain en monde d’intelligence artificielle ».
Alors qu’une certaine compétitivité dans le domaine de la recherche pousserait à développer les neurosciences, il devient urgent de mettre des limites pour ne pas se laisser dépasser par les avancées scientifiques. Mais quelles sont celles que les chercheurs accepteront de mettre en place ?
Pour aller plus loin :
« Ce n’est pas ma faute, mon implant cérébral m’a incité à le faire »
Un implant cérébral pour améliorer la mémoire
Des impulsions électriques cérébrales pour soigner les tics ?