L’infertilité est une épreuve comme en témoignent Mathilde et Enguerrand, « un couple de trentenaires qui souhaite l’arrivée d’un enfant depuis plus de trois ans », car « chaque mois, ce sont les montagnes russes : l’espérance, puis la chute ». Une épreuve pour le couple d’abord : « Nous n’arrivions pas en discuter » et « le risque pointait que les non-dits s’empilent et détruisent notre couple. »
Dans ce « combat contre le temps », « le temps qui passe et l’âge qui avance », le sentiment d’urgence a incité Elodie, normande de 33 ans, « à entamer un parcours de procréation médicalement assistée (PMA) quelques mois seulement après son mariage, il y a trois ans » car « sa fertilité est affaiblie par un syndrome des ovaires polykystiques ». Un parcours qui n’est pas de tout repos : « On passe à la chaîne, sans accompagnement pour comprendre ce qui se passe », on se sent « brinquebalée », raconte-t-elle.
De leur côté Constance et François ont affronté « ce parcours du combattant » pendant « près de dix ans ». Pensant que cela durerait un an. « Mais le tunnel n’en finissait pas ; l’attente et l’incertitude s’étiraient toujours plus, de manière insupportable ». Un parcours où le tout médical domine : « On est entraîné dans des examens sans fin, des tentatives à l’aveugle, des nouvelles pistes d’explications, des fausses promesses », alors que « dans le surgissement de la vie, il faut admettre qu’il reste quelque chose qu’on ne maîtrise pas complètement », reconnaît Constance. « C’est ce constat, à la fois simple et tragique, qui a manqué à François et à Constance dans leurs discussions avec le corps médical », avant d’arrêter leur parcours de PMA au bout de 5 ans, « épuisés » et d’entamer une procédure d’adoption. « Ils sont maintenant parents d’une petite fille de 20 mois. »
Mère d’une petite fille, Alice a elle aussi vécu « l’extrême solitude » du parcours de PMA avant que sa mère ne lui parle de la naprotechnologie, une médecine « de restauration de la fertilité ». Elle attend maintenant son deuxième enfant et témoigne : « Les médecins et les gynécologues ne connaissent finalement pas grand-chose à l’infertilité. Ils ne nous expliquent rien et se contentent de proposer des Fiv. »
Un constat partagé par Virginie Rio, présidente de l’association Collectif BAMP !, qui réunit des couples infertiles et des patients en PMA : « Il y a une course à l’échalote sur la PMA, sans effort pour aller voir à la racine de l’infertilité ». Et regrette que « le projet de loi relatif à la bioéthique, en discussion au Parlement, n’apporte absolument rien sur ce sujet ».
Car finalement on ne sait que « peu de choses » sur la fertilité humaine. Daniel Vaiman, directeur d’une équipe de chercheurs travaillant sur la reproduction, à l’hôpital Cochin en pointe la complexité : « La fusion de l’ovule et du spermatozoïde, par exemple, n’a pas d’équivalent dans le monde vivant. Que deux organismes différents fusionnent, cela n’arrive jamais ! Idem lors de l’implantation de l’œuf dans l’utérus : si on greffait une peau étrangère sur un organisme, il y aurait une réaction. Pourtant, les cellules du père qui composent la moitié de l’œuf implanté ne sont pas rejetées. Elles vont même se développer ! »,
Et la recherche semble au point mort comme le déplore Bernard Jégou, spécialiste de la reproduction humaine, directeur de recherche à l’École des hautes études en santé publique. Selon lui, « le fait que la technologie – avec les différentes Fiv, par exemple – a permis de contourner le problème de l’infertilité, sans le résoudre ».
Pour aller plus loin :
Mexique : le développement d’une technique de PMA suscite la polémique
En Hongrie : vers un remboursement intégral des FIV pour stimuler la natalité
La pollution de l’air pourrait altérer la fertilité féminine
Dire Stop à la FIV… parce qu’on peut être sans enfant et heureux
La Vie, Félicité de Maupeou (22/01/2020)