Ce dimanche 24 juillet 2016, à Manchester, l’Euroscience Open Forum (ESOF), a réuni un collectif de scientifiques, dont Emmanuelle Charpentier, biologiste française, co-découvreuse de la technique CRISPR-Cas9.
Si cet outil de thérapie génique suscite les plus grands espoirs (mais aussi des inquiétudes), Sheila Jasanoff, sociologue des sciences à Harvard, rappelle que « la route est encore longue avant d’identifier les gènes responsables de chaque maladie génétique pour pouvoir les remplacer ».
La technique soulève également d’importantes questions éthiques, car CRISPR-Cas9 permet d’intervenir sur le génome des cellules germinales (spermatozoïdes et ovules) et donc de modifier le patrimoine génétique d’individu et de ses descendants. Sheila Jasanoff interpelle alors sur le « besoin urgent et planétaire » d’un encadrement, pour sensibiliser le grand public et les scientifiques, afin que « cette technique qui bouleverse les lois de la biologie ne bouleverse pas l’éthique, la solidarité et les valeurs auxquelles nous sommes attachés ». Elle a appelé les chercheurs à partager publiquement leurs connaissances et leurs interrogations sur le sujet, pour éviter de se retrouver dans une situation similaire à celle « des nanotechnologies où le discours industriel et commercial a devancé l’explication scientifique, justifiant les craintes exprimées aujourd’hui dans la société ».
Selon la spécialiste américaine des enjeux éthiques des sciences et techniques, les applications potentielles de CRISPR-Cas9 exigent « une véritable réflexion citoyenne, les scientifiques n’ayant pas la légitimé démocratique pour décider seuls de l’encadrement de cette technique de manipulation génétique ».
Sciences et Avenir (Afsané Sabouhi) 27/07/2016