Le prélèvement d’organes après arrêt cardiaque: une problématique éthique

Publié le 20 Fév, 2013

 A l’occasion d’un congrès international qui s’est tenu à Paris début février, l’Agence de la Biomédecine, en partenariat avec l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) “a organisé une audition publique sur les prélèvements d’organes sur donneurs décédés par arrêt cardiaque“. (Cf Synthèse de presse quotidienne Gènéthique du 12 février 2013).  Actuellement, “les donneurs par mort encéphalique se font de moins en moins nombreux et l’augmentation des donneurs vivants (7,6% pour les reins) ne suffit pas“. Ainsi, la journaliste explique que “l’alternative qui s’impose peu à peu est le prélèvement sur donneur décédé après arrêt cardiaque (DDAC)“. Le classification du protocole de Maastricht de 1995 distingue 4 catégories de donneurs décédé après arrêt cardiaque: la première catégorie concerne les DDAC non contrôlé en “dehors de secours“, la deuxième concerne les DDAC non contrôlés “en présence de secour”, la troisième, appelée “Maastricht 3” ou (M3), concerne les DDAC contrôlés c’est-à-dire “les arrêts provoqués par une décision d’arrêter les traitements en raison du pronostic“, et la quatrième “suppose un arrêt cardiaque inopiné et irréversible au cours de la prise en charge en réanimation“.

Détaillant “Maastricht 3“, “très ambigu éthiquement“, la journaliste explique que dans cette catégorie de donneur, “les médecins décident d’arrêter les soins” en “appliqu[ant] les dispositions de la loi sur la fin de vie, dite Léonetti, de 2005“. Cependant, “l’ouverture du prélèvement aux DDAC laisse planer l’ombre de l’euthanasie utilitaire, d’une instrumentalisation de la mort“. A propos de cette pratique, un médecin fait part de ses inquiétudes: “Il y a un paradoxe temporel. Si on arrête les soins tôt, l’organe sera en très bon état, mais il y a une incertitude sur le pronostic neurologique. Si on attend, l’incertitude sera levée, mais le greffon risque de ne pas être bon“. A ce titre, le Pr Laurent Beylon, président de la commission d’éthique de la Société française d’anesthésie  et de réanimation (SFAR), complète: “quand on effectue un prélèvement sur une mort encéphalique, il n’y a pas de doute. Avec le M3, on change de paradigme. C’est une supposition clinique, cela introduit une démarche probabiliste“. Le président de la SFAR souligne, quant à lui, un vide juridique: “en tant que réanimateur, nous sentons notre fragilité. Quelque 45% des patients décèdent en 60 minutes, après un arrêt cardiaque, mais 1,2% ressort vivants. Il faut que le législateur nous aide à trancher ce contentieux“. 

 

A l’étranger, des prélèvements sur donneur de catégorie 3 sont réalisés en Espagne depuis 2009. Le Dr Rafael Matesanz, directeur de l’Organizacion national de transplantes précise: “il n’y a pas eu de discussions brûlantes dans la société, pas de difficultés avec M3. Peut-être parce que nous avons une vision positive de la limitation thérapeutique“. En Grande-Bretagne, le Pr Rutger Ploeg explique que “la décision de la fin de vie n’a rien à voir avec le don d’organes“. Il ajoute: “nous parlons beaucoup de la fin de vie en Angleterre, plus qu’en France. C’est nécessaire car la famille doit d’abord accepter l’arrêt du traitement. La question du don ne vient qu’après – sauf si la famille l’aborde spontanément“. 

 Le Quotidien du Médecin (Coline Garré) 21/02/13

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