Le guide pour « le respect des droits des familles et futures familles LGBT+ » : double jeu du gouvernement ?

Publié le 3 Mar, 2023

La DILCRAH, Délégation Interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT+ qui est placée auprès du Premier Ministre, a publié à la fin du mois de janvier 2023 un guide pour « le respect des droits des familles et futures familles LGBT+», présenté comme un « guide pratique pour accompagner les parents et futurs parents LGBT+ en leur permettant de connaître leurs droits, de les faire respecter et de les faire valoir »[1].

Il est étonnant de voir une institution gouvernementale éditer un guide spécifique à l’attention des familles LGBT+. Celles-ci ne sont pas seules concernées par la PMA, l’adoption, la discrimination, les congés maternité, de paternité, parental d’éducation etc. Alors qu’elles sont dites « des familles comme les autres », pourquoi leur dédier un guide spécifique ? Pourquoi le Gouvernement n’a-t-il pas plutôt édité un guide pour le respect des droits des familles en général ? Qu’est-ce qui justifie cette différence de traitement ?

Un guide consistant à encourager des pratiques contraires à la loi ?

La gestation pour autrui est notamment largement relayée dans ce guide. Dès la page 8, on retrouve ce syntagme dans les définitions clés, sans qu’il soit immédiatement précisé qu’elle est interdite en France : ce n’est indiqué qu’à la fin du document, en page 32, après l’exposé portant sur les moyens de faire établir en France une filiation avec l’enfant né de GPA à l’étranger.

La marchandisation du processus et de l’enfant est totalement passé sous silence, de même que la condamnation de cette pratique par le Parlement européen : « Le Parlement européen condamne la pratique de la gestation pour autrui, qui peut exposer à l’exploitation les femmes du monde entier, en particulier celles qui sont plus pauvres et se trouvent dans des situations de vulnérabilité, comme dans le contexte de la guerre » (cf. Ukraine : sous les bombes, le scandale de la GPA) [2].

Les conseils donnés pour faire établir la filiation de l’enfant né de GPA en page p.31 illustrent une nouvelle fois le double jeu mainte fois dénoncé du Gouvernement vis-à-vis du recours à cette pratique à l’étranger (cf. GPA : la « complaisance » de la France ?).

De même, au sujet de la PMA et du recours à des gamètes d’un tiers, le guide précise les « méthodes interdites » (p.11) comme l’insémination artisanale et le recours à une banque privée de gamètes. Mais s’agissant de cette dernière, le guide indique immédiatement comment faire établir la filiation avec l’enfant qui serait ainsi conçu. D’une main, il rappelle l’illégalité, et de l’autre, il donne les conseils pour apurer la situation juridique lorsque l’infraction a été commise.

N’est-il pas choquant de voir le Gouvernement prôner les solutions permettant d’éviter les conséquences d’une infraction à la législation ?

La prévalence donnée aux intérêts des adultes au détriment de l’intérêt supérieur de l’enfant

Un autre exemple en est donné par le traitement de la question des personnes dites transgenres.

Il est précisé que le terme « mère » concerne des personnes inscrites « femme » à l’état-civil. Le guide encourage ainsi la jurisprudence de la Cour d’Appel de Toulouse qui, le 9 février 2022, a fait prévaloir le « ressenti » d’un adulte sur la réalité biologique et l’intérêt de l’enfant de se voir délivrer un acte de naissance correspondant à cette réalité et non à un ressenti. La Cour d’Appel a en effet autorisé un homme biologique qui avait conçu naturellement son enfant dans le cadre d’une relation sexuelle avec son épouse, mais dont l’état-civil avait été modifié dans le sexe opposé, à figurer comme mère sur l’acte de naissance de l’enfant (cf. Né homme, la justice ordonne qu’il soit déclaré mère de son enfant).

Le guide revendique dans le même temps que des personnes inscrites comme homme à l’état-civil, c’est-à-dire des femmes de naissance, puissent bénéficier des droits attachés aux mères de famille, alors même qu’il milite pour qu’elles soient déclarées comme « père » sur l’acte de naissance de leur enfant.

On le voit, seul compte l’intérêt des adultes. L’enfant est toujours sommé de s’adapter aux ressentis ou aux combinaisons mises en œuvre pour assouvir le désir d’enfant. On ne peut que le regretter (cf. Intérêt de l’enfant : le « sombre » bilan du quinquennat).

 

[1] https://www.gouvernement.fr/lancement-d-un-guide-sur-le-respect-des-droits-des-familles-et-futures-familles-lgbt

[2] Résolution du Parlement européen du 5 mai 2022 sur l’impact de la guerre contre l’Ukraine sur les femmes (2022/2633 (RSP) P9_TA(2022)0206 : https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2022-0206_FR.pdf, §13

Olivia Sarton

Olivia Sarton

Expert

Avocat de formation, elle a exercé près d’une quinzaine d’années au barreau de Paris. Elle a rejoint Juristes pour l’enfance à l’automne 2019, en qualité de Directrice scientifique.

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