L’Agence de Biomédecine encadre ou encourage la recherche sur l’embryon ?

Publié le 3 Juin, 2015

 

Les journées de l’Agence de Biomédecine étaient l’occasion de dresser un bilan des recherches menées sur l’embryon et les CSEh depuis 10 ans en balayant conjointement les évolutions législatives et scientifiques. Les chercheurs ont également fait part de leurs projets en cours et des perspectives à venir.

 

Evolution des règlementations

 

L’Agence s’est félicitée de la libéralisation qui a eu lieu ces dernières années concernant les recherches sur l’embryon, avec notamment le remplacement du principe d’interdiction (assorti de dérogations) par celui d’autorisation voté en 2013 (cf Gènéthique du 1er juillet 2013). La loi de bioéthique de 2004 a donné autorité à l’agence de biomédecine pour délivrer les autorisations de recherche sur l’embryon et les CSEh, et elle lui permet aussi d’assurer le suivi, l’évaluation et le « contrôle » des projets dans ce domaine.

 

Ainsi en 10 ans, l’ABM a autorisé 73 protocoles, dont 12 sur l’embryon. 25 sont terminés, 9 ont été retirés, et 39 sont en cours. L’ABM a refusé 7 projets, et note qu’elle reçoit « moins de demande, car les chercheurs se tournent vers les iPS ».

 

L’Agence s’est félicitée également d’héberger en France un essai clinique[1] sur les « 3 ou 4 » autorisés dans le monde. Elle serait sur le point d’en autoriser 2 nouveaux : l’un concernant les maladies oculaires et l’autre le traitement des ulcères.

 

Evolutions scientifiques

 

Impossible pour l’ABM de ne pas mentionner la découverte des cellules iPS[2] en 2007 par le Pr Yamanaka, une alternative prometteuse à la recherche sur l’embryon humain. Cette découverte a « bouleversé » l’orientation des recherches, et nombre des acteurs présents aux journées de l’ABM ont affirmé vouloir « travailler à terme sur le iPS » : la « stratégie » adoptée est d’utiliser les CSEh comme « standard de pluripotence » pour « à terme, utiliser  les iPS ».

 

Cependant, le parti pris pour les recherches sur l’embryon et les CSEh est évident et se décèle tant à travers le choix des intervenants que dans les titres proposés pour les sessions. Etonnant, puisque le thème de ces journées était « la médecine personnalisée » : or quoi de plus personnalisé que la thérapie cellulaire menée à partir de cellules iPS qui utilise les cellules du patient lui-même ? Pourquoi ne pas en faire une priorité ? (cf Gènéthique du 5 décembre 2014)

 

Projets de recherche en cours

 

Six projets ont été présentés et discutés :

 

  1. Le traitement de l’insuffisance cardiaque à l’aide de CSEh : il s’agit d’un essai clinique de phase 1, mené par le professeur Menasché (cf Gènéthique du 25 février 2015).
  2. La production de globules rouges à l’aide de CS pluripotentes : Le Dr Hélène Lapillonne a présenté ses recherches, menées à la fois sur des CSEh, des iPS et des CS issues de sang de cordon (hES). Elle se positionne en faveur de l’utilisation des hES qui seraient plus performantes (voir à l’inverse Gènéthique du 16 avril 2014).
  3. La thérapie cellulaire pour traiter la maladie de Huntington, une maladie neurodégénérative : Le Dr Perrier cherche à traiter cette maladie résultant d’une dégénérescence massive des neurones par thérapie cellulaire. Il utilise des CSEh et des iPS.
  4. La transdifférenciation dans le traitement du diabète : Les recherches du Dr Collombat visent à mettre au point un nouveau traitement du diabète de type 1, du à une perte de cellules spécialisées du pancréas. Elles ont été menées sur la souris et les résultats sur l’homme sont positifs, sans utiliser l’embryon.
  5. Le transfert de noyau somatique chez l’homme et chez l’animal ou clonage : Le Dr Nathalie Beaujean a expliqué que son objectif était d’«aider à la reprogrammation des iPS grâce au modèle clonal ». Cependant ses recherches actuelles portent sur le clonage thérapeutique, à l’aide d’embryons animaux obtenus par transfert de noyau.
  6. Le transfert nucléaire dans les maladies mitochondriales, également appelé « FIV avec don de mitochondries » ou « FIV à trois parents » : le Dr Julie Steffan-Nordmann a reconnu que cette technique posait un certains nombre de questions « non seulement éthiques mais également scientifiques » puisqu’on ne connait pas les conséquences à long terme des interactions entre trois ADN différents (cf Gènéthique du 4 février 2015).

 

Les six orateurs choisis par l’Agence de Biomédecine ont tous encouragé la recherche sur l’embryon et les CSEh.

 

[1] Essai clinique de phase 1 mené par le professeur Ménasché ; les essais cliniques sont autorisés par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament

[2] Cellules adultes qui, une fois rajeunies, retrouvent des propriétés équivalentes aux cellules souches embryonnaires (ES)

 

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