La trisomie 21 au cœur d’une politique eugéniste

Publié le 20 Avr, 2009

Dans Liberté Politique, Pierre-Olivier Arduin, responsable de la commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon, revient sur la trisomie 21, maladie qui semble concentrer sur elle tous les rejets contemporains.

"Éradiquer les anomalies chromosomiques et autres mutations génétiques est devenu la fin dernière de la biomédecine contemporaine. Sauf que dans ce cas, il faut éliminer ceux qui en sont porteurs", explique-t-il. Pour plusieurs personnalités (ministres, scientifiques et médecins), cette maladie devrait être effacée de la société.

Nadine Morano, par exemple, qui est favorable aux mères porteuses, demande que dans l’éventualité où la gestation pour autrui soit inscrite dans la prochaine loi, le contrat entre les parents commanditaires et la "femme" porteuse mentionne explicitement que les parties contractantes s’engagent à ce qu’une interruption médicale de grossesse (IMG) soit pratiquée si le diagnostic de trisomie 21 est posé. Autrement dit, l’avortement d’un enfant à naître porteur de cette maladie ferait l’objet d’un consentement anticipé homologué chez le juge.

Par ailleurs, nombreux sont ceux qui souhaitent un élargissement du diagnostic préimplantatoire (DPI) réservé à l’origine aux couples qui "ont une forte probabilité de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie génétique d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic". Claude Sureau a été le premier à proposer un double DPI qui rechercherait non seulement l’affection causale mais aussi la trisomie 21.

Mais le plus véhément, est certainement le professeur Israël Nisand, chef du service de gynécologie-obstétrique du CHU de Strasbourg. "C’est vrai que c’est gênant à entendre, c’est vrai que nous avons mis des programmes eugéniques en place. Le dépistage de la trisomie 21, ça existe actuellement dans notre pays, tous les ans 800 000 femmes se tapent un dépistage, et si demain un gars met sur le marché une prise de sang qui détecte la trisomie 21, il fait un malheur. Oui, on choisit les enfants à naître dans notre pays même si cela ne nous plaît pas", affirmait-il lors d’une audition au Parlement à la suite d’une remarque du député Jean-Sébastien Vialatte.

Dans son ouvrage, "La trisomie est une tragédie grecque", Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme Lejeune, dénonce les relents économiques qui sous-tendent nos choix de santé publique en matière de trisomie 21.

Le Haut comité de la Santé publique invoque aussi cette raison financière pour justifier le dépistage : "l’analyse coût-bénéfice, quand elle se contente d’opposer le coût collectif des amniocentèses et des caryotypes et celui de la prise en charge des enfants handicapés qui n’auraient pas été dépistés, et sous l’hypothèse qu’un diagnostic positif est suivi systématiquement d’une interruption médicale de grossesse, montre que l’activité de diagnostic prénatal est tout à fait justifiée pour la collectivité" (Pour un nouveau plan périnatalité, 1994).

Lors de son audition à l’Assemblée nationale, Israël Nisand, a lui aussi brandi l’argument économique pour justifier ce dépistage : "du fait du déplacement de l’âge des mères de 4 ans en 20 ans, on féconde 1 600 trisomiques en plus par an avec une espérance de vie de 75 ans. Il y en a déjà 30 000 dans notre pays ; si les 1 600 qui sont fécondés en plus par an naissaient, l’argent de l’État n’y suffirait pas"

 Liberté Politique.com (Pierre-Olivier Arduin) 17/04/09

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