Dans les prochains mois, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) devra se prononcer sur une affaire* mettant en cause le statut de l »embryon humain.
Les faits sont les suivants: en 2002, une femme âgée de 48 ans, et atteinte d’endométriose, entreprend un processus de PMA (procréation médicalement assistée) avec son mari. Cinq embryons sont alors conçus « in vitro » « puis congelés pour une future implantation ». A la mort de son mari en 2003, la requérante renonce à poursuivre le processus de PMA. Ses embryons demeurent congelés depuis. Or en 2004, une loi votée en Italie « prévoit notamment l’interdiction de la destruction des embryons humains ‘in vitro’ « . La requérante, qui souhaitait détruire ses embryons en les donnant à la recherche saisit la CEDH alléguant de »son droit de propriété sur les embryons humains (art. 1 du protocole n°1) et du droit au respect de sa vie privée et familial (art. 8)« .
Dans une tribune, Grégor Puppinck, directeur du Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), commente cette affaire et rappelle que l’embryon humain a la qualité de « sujet » et non de « chose« . Mais « alléguer une violation du droit de propriété implique de dénier aux embryons humains la qualité de ‘sujets’ de droit pour les qualifier de ‘chose‘ » explique-t-il.
Autorisé à soumettre ses observations écrites à la CEDH, l’ECLJ rappelle que:
– cette loi votée en Italie a été adoptée pour deux raisons: « fixer des normes éthiques » et « mettre fin à ce que l’on appelait alors le ‘far-West reproductif’ « .
– par la loi de 2004, « le législateur italien a reconnu à l’embryon humain ‘in vitro’ la qualité de ‘sujet’, au même titre que les autres ‘sujets impliqués’ dans la PMA, et vise à garantir le droit à la vie« . D’où l’interdiction de la destruction volontaire des embryons conçus et prescrit la congélation des embryons non (encore) implantés ».
– la CEDH accorde que la Convention protège « l’embryon ou au foetus à partir du moment où le droit interne leur accorde cette protection« . Ce qui est le cas en l’espèce.
– la volonté de la mère de donner les « embryons à la science pour le progrès de la médecine […] ne peut justifier la destruction des embryons ‘in vitro‘ » dans la mesure où « le principe juridique de la primauté de l’être humain sur l’intérêt de la science et de la société s’y oppose nettement« .
– « l’existence d’un quasi-consensus » au sein des Etats européens qui autorisent en majorité la « recherche destructrice sur l’embryon n’est pas de nature à créer une obligation conventionnelle de légaliser une telle pratique« , cette « obligation ne trouverait de toutes façons pas de fondement dans la Convention elle-même« .
Par conséquent, « dès lors que le législateur italien a entendu reconnaître » la qualité de « sujet » à l’embryon et « que s’applique le principe de primauté de l’être humain, il est impossible de faire droit aux demandes de la requérante« .