La NaProTechnology, une médecine de la fertilité comme alternative à la PMA

Publié le 11 Oct, 2016

Ils sont un peu moins d’une trentaine à suivre la première partie de la formation pour devenir soit instructeur du système FertilityCare™, soit médecin spécialisé en NaProTechnology[1]. Ils sont médecins, sages-femmes, infirmières mais aussi professionnels issus d’autres secteurs aussi variés que le design, l’informatique et viennent de toute l”Europe. On y trouve des slovaques, des espagnols, des portugais, des allemands, des polonais et des français.

 

La NaProTechnology (Natural Procreative Technology) se présente comme une médecine de la fertilité, comme une spécialité médicale restauratrice de la fertilité naturelle. Elle est née aux Etats-Unis grâce, entre autres, aux travaux du Dr Hilgers dans le prolongement des travaux des Drs Billings. La PMA[2] est aussi une médecine de la fertilité et à sa manière, elle est également restauratrice de la fertilité. Alors quel intérêt présente la NaProTechnology ? N’est-elle pas un effet de mode comme tant de nouveautés, arrivant d’Outre-Atlantique, peuvent l”être ?

 

Se réapproprier l’enfant

Anne-Catherine Berthier est sage-femme dans le Gers. Certaines de ses patientes ont bénéficié de FIV[3] et elles ont très mal vécu une prise en charge pauvre d’un point de vue psychologique. Les couples se sont sentis très seuls, exclus de ce qui se passait, exclus de la conception de leur enfant. Voilà bien une situation des plus paradoxales où des parents ne sont nullement participants à la conception de leur enfant, à son enfantement qui devient une production alors que leur couple devrait se trouver au centre du processus. A la place, ce sont leurs gamètes qui sont sujets de préoccupation et l’étrangeté de leur infertilité. L’enfant est envisagé comme un défi, non comme un don. Pour Anne-Catherine Berthier, la NaProTechnology est une valeur humaine, et pas seulement technique, ajoutée à son métier. Ce sont des réponses existentielles amenées par le suivi avec l’instructrice autant que des réponses médicales et chirurgicales que le médecin pourra ensuite amener. Au cours de ses consultations, elle constate également que les femmes ignorent, pour la très grande majorité, quelles sont leurs périodes de fertilité. Elles ont des connaissances approfondies sur de très nombreux sujets mais elles ignorent certains aspects d”un sujet essentiel : elles-mêmes. Parfois une simple éducation suffit à faire venir le trésor tant désiré.

 

La NaProTechnology, du soin mais pas seulement

Le Dr Galuszka, gynécologue-obstétricien polonais, explique : “Je voulais quelque chose de nouveau pour aider ces couples, une technique qui prenne soin, qui respecte les gens”. Prendre soin du soin, c’est une des préoccupations qui revient le plus souvent chez les participants à cette session. La PMA ne prend pas soin, d’où le sentiment d’abandon, d’isolement. La PMA fait de la technique, certes adaptée à la situation, mais fait de la technique. La NaProTechnology personnalise, d’une manière différente de la PMA, et surtout écoute et prend le temps (les rendez-vous avec l’instructrice, les practitioners, ne durent pas moins d’une heure). On écoute, on prend le temps. Car traiter l’infertilité est infiniment plus large que prendre en charge le seul problème physiologique, qui restera peut-être en l’état. La NaProTechnology n’entend pas aller contre la nature mais l’accompagne, ce qui signifie l’accompagner aussi dans ses impossibilités. Cela implique donc de prendre soin d’un couple, de sa communication, de sa relation charnelle qui court le très grand danger de n’être plus qu’utilitaire et de tuer le désir d’un homme et d’une femme. C.M., une infirmière française, est présente lors de cette session comme étudiante. Avec son époux, elle bénéficie d’une prise en charge en NaProTechnology. Cette prise en charge du couple est pour elle un des aspects les plus positifs de ce qu’offre la NaProTechnology : se connaître mais également soutenir le couple dans cette épreuve, l’aider à tenir dans une société où un couple marié ne trouve sa place que s’il enfante. Plusieurs dans cette session ont connu, connaissent encore la douleur du ventre vide. Bettina, une étudiante allemande, a des larmes dans les yeux lorsqu’elle évoque sa petite fille de quelques mois née grâce à la NaProTechnology.

 

Le Dr Nyc, polonais lui-aussi, est également gynécologue-obstétricien. Depuis huit ans, il fait de la NaProTechnology sans le savoir ou presque. Ce qui l’intéresse dans cette approche, c’est la cohérence entre la prise en charge de l’infertilité et les problèmes éthiques qu’elle soulève. On intervient ici pour accompagner et non se substituer au couple. Puis devant les résultats qu’il obtient (entre 35 et 40 % de réussite sur des prises en charge longues) en particulier grâce à la chirurgie, il se décide à partir en formation. Ils sont plusieurs médecins du même établissement à être partis au Portugal et la deuxième session aura lieu pour eux aux Etats-Unis. Elle exige en effet des locaux techniques, nécessaires entre autres, pour la partie chirurgie de la formation.

 

Pour une redécouverte de la relation dans le couple

La NaProTechnology est née du Système FertilityCare™ : un “nouveau système standardisé et très efficace de régulation naturelle des naissances [qui] permet de prendre soin et de gérer [sa] fertilité de façon sûre[4]FertilityCare™ n’est pas un système qui remplace et annule les autres méthodes de régulation des naissances mais une autre approche qui conviendra à certains couples plutôt qu’à d’autres. Il vient enrichir l’offre tout en montrant que la recherche est active et constante sur ces questions précises bien que trop peu connue en France. Anne-Catherine Berthier, comme d’autres sages-femmes présentes, insiste sur l’importance de cette partie qui permet à chaque couple de découvrir sa sexualité autrement qu’au travers de la seule génitalité et donc aux femmes de se réconcilier avec un corps trop souvent perçu comme un objet de jouissance et non comme entièrement constitutif et unitif de leur personne. Pascaline Furet, une conseillère conjugale qui n’a pas suivi cette session, insiste sur ce point. Elle cite les trop nombreux couples reçus qui ne savent plus se toucher juste pour exprimer leur tendresse, qui finissent par s’éloigner l’un de l’autre car le contact physique n’est plus lié qu’au sexe. C’est sans doute la très grande richesse de ce système, la redécouverte du corps, des corps et la renaissance d’un vrai désir qui va conjointement avec la redécouverte de l”autre, la redécouverte de sa personne, de qui il est.

 

[1]. http://www.fertilitycare.fr/

[2]. Procréation Médicalement Assistée.

[3]. Fécondation In Vitro.

[4] Cf. le site internet de FertilityCare™ : http://www.fertilitycare.fr/.

Laurence Henry

Laurence Henry

Expert

Infirmière anesthésiste, Laurence Henry a suivi une formation de bioéthique à l'Institut politique Léon Harmel et obtenu un master 1. Elle a publié "On ne peut imposer ça à personne, handicap du nourrisson et euthanasie" (2013, ed. Salvator) et prépare actuellement un doctorat de philosophie pratique à Paris-Est Marne-la-Vallée.

Partager cet article

Textes officiels

Fiches Pratiques

Bibliographie

Lettres