L’« arme puissante » du séquençage génétique, nouvel « enjeu de pouvoir » pour les gouvernements

Publié le 16 Mar, 2021

En Thaïlande, un vaste programme de séquençage du génome de la population a été lancé. L’équipe du professeur Vorasak Chotleusak ambitionne de collecter une base de données de 50.000 personnes, à la demande du gouvernement thaïlandais. Car « la génétique et ses implications médicales sont devenues des leviers géopolitiques ».

Le professeur Vorasak Chotleusak, installé dans un laboratoire de Bangkok, explique l’importance, pour chaque pays, de « développer sa propre base de données génétiques ». Aujourd’hui, la majorité des données disponibles pour la recherche, notamment le développement de nouveaux médicaments, est issue des populations occidentales, « ce qui peut parfois s’avérer dangereux ». Le professeur donne comme exemple la carbamazépine, un antiépileptique efficace chez les Occidentaux et risqué chez les Asiatiques. En effet, 8 à 10 % de la population d’Asie du Sud-Est et du sud de la Chine possèdent une forme particulière du gène HLA, multipliant par 1000 le risque d’être allergique à la carbamazépine. Le Pr Chotleusak pense que dans un futur « plus ou moins proche », chaque personne aura le séquençage de son génome consigné dans son dossier médical, pour « voir quel type de médicament, et à quelle dose, est approprié pour cet individu en particulier, en fonction de son génome ». C’est la pharmacogénétique.

Les Etats-Unis sont en train de séquencer le génome d’un million de personnes, le Royaume-Uni 5 millions, la Chine 100 millions… La course au génome devient un « enjeu géopolitique », car en définitive,  le pays « qui a le plus de données sur sa population définit aussi la norme de l’être humain ». Cela peut devenir une « forme de domination », car « celui qui remporte la course définit les règles ». L’objectif et les motivations profondes de chaque gouvernement prennent toute leur importance, selon qu’il recherche « la paix ou la guerre », car « la génétique peut être une arme extrêmement puissante ».

Les applications de la génétique sont nombreuses, en sciences sociales ou en histoire, par exemple, pour cartographier des mouvements de population. Mais aujourd’hui on parle même de « génopolitique », une idée selon laquelle la génétique influerait sur notre comportement politique. Le professeur va plus loin, ajoutant que même notre rapport à la génétique « trahit […] nos différences culturelles ». Par exemple, les Occidentaux sont « obsédés par le passé », en recherche permanente de leurs origines et de leur histoire. Au contraire, les Chinois « s’en fichent », car « ce qui les intéresse, c’est le futur ». Est-ce que leur enfant sera artiste ? Musicien ? Athlète ? Scientifique ? Les tests génétiques en vogue vendent « le passé aux Européens et le futur aux Chinois » conclut le Pr Chotleusak.

Source : Europe 1, Carol Isoux (14/03/2021) – Photo : iStock\DR

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