Hier, lors de sa journée annuelle d’éthique, le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) discutait de son récent avis sur l’extension du diagnostic pré implantatoire (DPI). Le DPI est une pratique visant à détecter une maladie, dont l’un ou les parents sont porteurs, chez les embryons fécondés afin de ne conserver et de n’implanter que l’embryon sain. L’extension du DPI consisterait à autoriser la création de “bébés médicament” c’est à dire la sélection d’un embryon indemne et dont le patrimoine génétique serait compatible avec celui d’un aîné atteint par une maladie génétique en vue d’une greffe (cf. dossier DPI).
Les membres du CCNE ont estimé que “le désir légitime d’enfant n’est pas le droit à l’enfant-objet. Pas plus que l’on ne doit fabriquer des embryons pour la recherche et le soin, il n’est légitime d’envisager d’entreprendre une grossesse dans un autre but que le bien de l’enfant lui-même.(…) A fortiori, la sélection d’un embryon et la mise en route d’un enfant conçu seulement comme un donneur potentiel, et non d’abord pour lui-même, n’est pas pensable au regard des valeurs qu’a toujours défendues le CCNE”. Mais ensuite le CCNE déclare “en revanche, permettre qu’un enfant désiré représente, de plus, un espoir de guérison pour son aîné, est un objectif acceptable, s’il est second ” (cf. revue de presse du 09/07/02).
Etaient présents et se sont exprimés tour à tour : Gérard Bréart, membre du CCNE, Eliane Gluckman, Chef du Service de greffe de moelle à l’hôpital Saint-Louis, René Frydman, Chef du Service de Gynécologie-Obstétrique à l’hôpital Antoine-Béclère, Jacques Milliez, Chef du Service de Gynécologie-Obstétrique à l’hôpital Saint-Antoine et Monette Vacquin, Psychanalyste.
René Frydman, à la fois juge et partie dans ce débat puisque c’est lui qui avait sollicité l’avis du CCNE, a appelé à d’autres extensions du DPI à partir du moment où il y a un véritable encadrement et une relation médicale poussée.
Jacques Milliez s’est dit aucunement inquiet sur la pratique du DPI mais s’est interrogé sur sa portée eugéniste. Il a montré que l’eugénisme était “admirable, acceptable, bénéfique” quand il répondait à une demande individuelle des parents, libre et totalement consenti (cf. revue de presse du 24/10/02).
Monette Vacquin a ensuite montré que le terme “solidarité” utilisé dans le cadre de la réflexion sur le DPI était omniprésent dans les discussions graves de bioéthique. Dans le cas de l’extension du DPI au bébé médicament, elle se demandait : comment peut on présupposer d’un enfant non encore né et donc ne parlant pas qu’il voudrait être solidaire de son aîné ? Monette Vacquin suggérait d’utiliser un autre terme que “solidarité”.
La journée s’est terminée par l’intervention de Luc Ferry, Ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche. Il a demandé aux membres du CCNE de poser des “limites fines“, de “ne pas céder au fondamentalisme éthique” et de “résister à l’idéologie de la pente glissante” qui présente le DPI comme eugéniste et la recherche sur l’embryon comme une instrumentalisation de l’embryon.
Il a terminé en regrettant que la recherche sur les cellules souches embryonnaires ait pris du retard et en affirmant que s’il n’en tenait qu’a lui, elle aurait été autorisée depuis longtemps.
Pour plus d’informations, consultez en ligne :
L’avis n°72 du CCNE sur l’extension du diagnostic pré-implantatoire
Le dossier Diagnostic pré-implantatoire de Gènéthique
Génèthique