L’adoption jeudi de l’amendement créant un délit d’interruption involontaire de grossesse (cf revue de presse du 28/11/03) proposé par le député UMP Jean-Paul Garraud a suscité de nombreuses réactions non seulement dans les rangs politiques mais aussi des professionnels de la santé et du droit.
Face au tollé suscité par la création de ce délit, le garde des Sceaux, Dominique Perben assure que cette disposition “offre une protection pénale à la femme enceinte” et a annoncé “qu’il allait engager une concertation avec les partenaires intéressés afin d’aboutir à une rédaction dépourvue de toute ambiguïté.”
Interrogé dans le Figaro et dans Libération, Jean-Paul Garraud rappelle que jusqu’en 2001, lorsque quelqu’un causait la mort du foetus d’une femme enceinte, les tribunaux reconnaissaient l’homicide involontaire.
En 2001, la Cour de cassation a renversé sa jurisprudence. Désormais la haute juridiction ne reconnaît l’homicide involontaire qu’à partir de la naissance. La seule possibilité pour ces femmes est désormais de se tourner vers la Cour européenne des droits de l’homme. Son amendement explique t-il “protège les femmes enceintes, il ne reconnaît pas un statut au foetus”. “Je ne fais que combler un vide juridique” ajoute t-il.
Philippe Douste-Blazy a précisé de son côté que “la majorité ne remet pas en cause le droit à l’avortement. Il est terrible à propos d’un amendement qui souhaite protéger la femme, de relancer un débat qui est clos dans ce pays” a t-il souligné.
Pour la plupart des juristes, ce texte n’entraîne pas, en l’état, la reconnaissance d’un statut juridique du foetus et ne remet pas en cause l’IVG. Pour Claudine Esper, professeur de droit à Paris V, il fallait “clarifier la situation”. “Le texte de cet amendement renforce simplement la protection de l’enfant à naître” ajoute t-elle. Comme nombre de juristes, Mme Dreifuss-Netter, professeur de droit à Paris – V estime que cet amendement ne remet pas en cause l’IVG.
Le professeur Claude Sureau, président d’honneur de l’Académie de médecine, approuve l’amendement :“il est logique que des sanctions pénales puissent exister si quelqu’un a soustrait un enfant au projet parental”. S’expliquant sur la reconnaissance d’un statut juridique de l’embryon, il affirme : “reconnaître que le foetus in utero est un patient n’en fait pas pour autant une personne au sens juridique du terme”.
Enfin, Jean-François Mattéi a assuré que “cette disposition ne saurait en aucun cas porter atteinte au droit actuel de l’IVG” et il s’est efforcé de rassurer les professionnels de la santé en affirmant que “le gouvernement veillera à ce que les conditions d’exercice des médecins ne soient en aucune manière affectées”.
> Lire en ligne le dossier Gènéthique « Homicide involontaire du fœtus »
PROPOSITION DE LOI portant création d’un délit d’interruption involontaire de grossesse.
Le Figaro 29/11/03 & (Guillaume Perrault) 01/12/03 – Le Monde (Paul Benkimoun – Sandrine Blanchard – Nathalie Guibert) 01/12/03 & 29/11/03 – Libération (Blandine Grosjean) 29/11/03 & 01/12/03 – Nouvel Observateur 01/12/03 – Le Quotidien du Médecin 01/12/03 – La Croix (Marianne Gomez) 01/12/03