Le Monde publie un reportage sur la pratique des mères porteuses en Inde, seul pays à en autoriser une pratique commerciale. "Terre d’accueil pour les délocalisations de grossesses", l’Inde compte à ce jour 3 000 maternités pratiquant ce procédé, moyennant 20 000$ (soit 13 000€), c’est-à-dire cinq fois moins qu’aux Etats-Unis. Alors que les demandes de couples étrangers ne cessent d’augmenter (elles auraient quadruplé l’année dernière), ce nouveau marché est estimé à 450 millions de dollars, soit 290 millions d’euros.
Si les autorités cautionnent largement cette pratique – notamment utilisée par les Indiennes pauvres, rémunérées 2 500 euros – certaines questions demeurent en suspens. "En l’absence de loi, les mères porteuses s’exposent à tous les dangers", dénonce Bhavana Kumar, coordinatrice au Conseil national des femmes. "Désormais, le corps peut être exploité commercialement. C’est la porte ouverte à tous les abus", prévient le Dr Girija Viyas, présidente de la Commission nationale des femmes.
C‘est pour tenter d’encadrer cette pratique que la ministre indienne des femmes et de la protection de l’enfance, Renuka Chowdhury a, le 25 juin dernier, promis le vote d’une loi dans les prochains mois qui prévoirait notamment un accompagnement psychologique de la mère, une limitation du nombre d’accouchements pour autrui et fixerait l’âge légal de la mère porteuse entre 22 et 45 ans. Mais, pour l’obstétricienne Asha Jaipuria, une telle loi ne résoudrait pas tous les problèmes : "qu’est-ce qui peut garantir aux parents que certains de leurs ovules ou spermatozoïdes ne seront pas conservés pour être ensuite revendus à des mères indiennes désirant avoir un bébé au teint clair ?".
Autorisée au Royaume-Uni, en Israël ainsi que dans certains Etats des Etats-Unis et du Canada, tolérée en Belgique et aux Pays-Bas, la pratique des mères porteuses est interdite en France. Toutefois, dans tous ces pays, la pratique commerciale des mères porteuses est interdite. Certains couples français qui se rendent à l’étranger pour recourir à cette pratique ne peuvent pas, à leur retour en France, retranscrire les actes de naissance et faire reconnaître la filiation entre mère et enfant. Néanmoins, la Cour d’appel de Paris a autorisé, à l’automne dernier, la transcription des actes de naissance de jumelles nées d’une mère porteuse en Californie (cf. Synthèse de presse du 05/11/07).
Jugeant qu’il était "injuste" que seuls les couples qui en ont les moyens puissent se payer une mère porteuse et que les enfants nés de cette pratique soient privés de leur filiation maternelle, un groupe de travail du Sénat a proposé de légaliser la gestation pour autrui (cf. Synthèse de presse du 26/06/08). Appelée aussi maternité du substitution, celle-ci serait autorisée pour les couples hétérosexuels mariés ou vivant ensemble depuis deux ans, après accord de l’Agence de la biomédecine et d’un juge. Il est précisé qu’aucune rémunération ne serait autorisée. Le texte de loi devrait être débattu au cours de la révision des lois de bioéthique de 2004 qui devrait se tenir en 2009.
Le Monde (Julien Bouissou) 05/08/08 – Bio Edge 28/08/08