Gamétogenèse in vitro : la HFEA recommande une règlementation « plus explicite »

Publié le 4 Fév, 2025

Les « nouvelles possibilités » de culture d’ovocytes et de spermatozoïdes humains en laboratoire – ainsi que « les risques, les avantages et les considérations éthiques » qui y sont liés – ont conduit l’Autorité britannique en matière de fécondation humaine et d’embryologie (HFEA) à s’interroger sur « l’opportunité » de réviser la législation dans ce domaine [1].

La gamétogenèse in vitro (GIV) est un processus de fabrication de gamètes fonctionnels en dehors du corps, « généralement à partir de cellules souches ». Elle a déjà permis de donner naissance à des animaux vivants, notamment des souris et des rats (cf. Gamétogenèse in vitro : des chercheurs poursuivent leurs travaux chez la souris Etats-Unis : trois souriceaux nés d’une cellule de peau ; Gamétogenèse in vitro : de nouveaux résultats chez le rat). Jusqu’à présent, les chercheurs n’ont pas réussi à créer des gamètes humains matures et viables en mettant en œuvre cette technique, mais des précurseurs de gamètes humains ont été fabriqués de cette manière et « d’autres avancées sont attendues » (cf. Des chercheurs génèrent des précurseurs de gamètes humains à partir d’iPS).

Eviter un débat parlementaire ?

L’utilisation de la gamétogenèse in vitro n’est pas légale au Royaume-Uni. « Ce que nous essayons de faire, c’est de prendre de l’avance sur la question », a déclaré Peter Thompson, directeur général de la HFEA. « Plutôt que d’être surpris par quelque chose, nous devons commencer à discuter de la question de savoir si la loi doit être modifiée pour autoriser ce type de technologies. Et y a-t-il des choses qui devraient tout simplement être interdites ? »

Lors de sa dernière réunion, la HFEA a examiné plusieurs questions concernant cette technique. Ses membres ont tout d’abord convenu qu’il y avait lieu de recommander que la GIV fasse l’objet d’une réglementation statutaire « plus explicite » qu’elle ne l’est actuellement. Par ailleurs, ils considèrent qu’il y a lieu d’introduire à l’avenir une « législation secondaire relative à la GIV ». « De cette manière, la GIV pourrait être autorisée et réglementée dans le cadre de la reproduction humaine si et quand cela s’avère approprié, plutôt que de devoir soumettre l’ensemble de la loi sur la fécondation humaine et l’embryologie à un débat parlementaire pour y parvenir ».

Certaines utilisations « éthiquement et socialement complexes »

Les membres de la HFEA jugent en outre qu’il faut rendre « plus explicite » dans la législation primaire [2] le fait que la gamétogenèse in vitro ne peut pas être utilisée pour une PMA, « à moins qu’une législation secondaire ne soit introduite pour l’autoriser ».

Enfin, ils ont convenu qu’il devrait y avoir une « interdiction explicite et préventive » de certaines utilisations de cette technique qui sont « biologiquement dangereuses » et « éthiquement et socialement complexes ».

Vers la fin du père et de la mère ?

Selon l’autorité, des scénarios dans lesquels un enfant pourrait n’avoir qu’un seul parent biologique, ou plus de deux parents biologiques, relèvent de ces utilisations problématiques. La HFEA n’évoque pas en revanche les situations où des enfants seraient conçus avec deux parents biologiques de même sexe. Des chercheurs sont parvenus un tel résultat chez la souris, par différentes techniques (cf. Empreinte génomique : des souris nées de « deux pères » atteignent l’âge adulte ; Des souriceaux nés de deux « pères »). Ils travaillent déjà dans ce sens sur le primate en vue d’une application chez l’homme, sans pour autant susciter l’émoi de la communauté scientifique apparemment.

De surcroit, comme si ces quelques menues précautions étaient déjà excessives, la HFEA précise dès à présent que les utilisations qu’elle juge « complexes » aujourd’hui « pourraient sembler plus acceptables à l’avenir ». Selon l’autorité, « de telles interdictions devraient être réexaminées au fur et à mesure que la science et la société évoluent ».

La recherche ne doit-elle donc connaitre aucune limite ?

 

[1] BioNews, HFEA recommends law review in light of lab-made eggs and spermv, Lynne Smit (03/02/2025)

[2] Concept en droit anglo-saxon. La législation primaire est adoptée par le Parlement. La législation secondaire (ou dérivée) prend la forme de textes législatifs délégués pris par le Souverain, le gouvernement du Royaume-Uni, ou une autre autorité. D’autres actes de législation dérivée peuvent être adoptés sous forme d’ordonnances administratives. (Source : e-justice.europa.eu)

Partager cet article

Synthèses de presse

La Toscane adopte un règlement sur le suicide assisté
/ Fin de vie

La Toscane adopte un règlement sur le suicide assisté

La Toscane est devenue, le 11 février 2025, la première région italienne à adopter un règlement détaillant les modalités d'accès ...
Le programme d’éducation à « la vie affective, relationnelle, et à la sexualité » publié au Bulletin officiel
/ Genre

Le programme d’éducation à « la vie affective, relationnelle, et à la sexualité » publié au Bulletin officiel

Le programme Evars a été publié au Bulletin officiel de l’Education nationale le 6 février, pour une mise en œuvre ...
Un Québécois coupable d’agressions sexuelles euthanasié : « Il ne sera jamais puni pour ce qu’il nous a fait »
/ Fin de vie

Un Québécois coupable d’agressions sexuelles euthanasié : « Il ne sera jamais puni pour ce qu’il nous a fait »

Un Québécois reconnu coupable d’agressions sexuelles sur des mineurs a été euthanasié le 4 février. « Il n’aura finalement pas passé ...

 

Textes officiels

 

Fiches Pratiques

Bibliographie

Lettres

Recevez notre lettre hebdomadaire

Recevez notre lettre hebdomadaire

Chaque semaine notre décryptage de l'actualité bioéthique et revue de presse.

Votre inscription a bien été prise en compte.