A Bagnères-de-Bigorre, la famille d’un patient dont « l’alimentation et les soins avaient été arrêtés » a obtenu la reprise des traitements auprès du tribunal administratif de Pau, le 10 janvier. Le tribunal a estimé que « la décision d’arrêt des soins n’avait pas été une décision collégiale comme l’exige la loi ».
Ce patient, un homme de 70 ans originaire de Tarbes est hospitalisé « dans un état végétatif depuis 2013, suite à un accident cardiaque ». Ses proches indiquent qu’ « il communique par des battements de paupières ». L’hôpital de Bagnères avait décidé de l’arrêt des soins, le 3 décembre dernier, « suite à une aggravation de son état ». Depuis la reprise des soins, « le septuagénaire aurait de nouveau pu communiquer par des battements de paupières ». L’avocat de la famille, Me Roger-Vincent Catalayud, a déclaré : « Il ne s’agit rien moins que de la vie d’un homme ! »
Cette nouvelle intervient alors que Steven Laureys, neurologue, directeur du Coma science group à l’hôpital universitaire de Liège a reçu le prix Generet de la Fondation Roi Baudoin, d’un montant de plus d’un million d’euros, pour ses travaux sur les patients souffrant d’un traumatisme crânien. Le fonds Generet a été lancé en 2018 « pour financer des recherches sur des maladies rares pour lesquelles les traitements ne sont pas rentables pour les compagnies pharmaceutiques et trop chers pour les départements universitaires ».
Le chercheur déclare vouloir combattre « cette épidémie silencieuse et aider les personnes ignorées comme « végétatives » qui, on le croit, ne guériront jamais ». Steven Laureys déclare d’ailleurs que « c’est un horrible terme », auquel il préfère celui de « veille inconsciente ». Steven Laureys affirme que considérer la conscience comme « tout ou rien » est une vision « dépassée », indiquant qu’ « un tiers des patients qu’il suit ont été diagnostiqués à tort comme étant en état végétatif, en dépit de signes de conscience ». Chaque année, en Belgique, « 50 personnes se réveillent en état de veille inconsciente, tandis que 100 en état de conscience minimale ». Pour le neurologue, avec cette épidémie silencieuse qui compte « des centaines de patients », « le risque est aussi de donner un faux désespoir ». Comme cela a été le cas pour la famille de Stig Broeckx, champion cycliste ayant subi un accident, à qui on n’a donné aucun espoir. Aujourd’hui, il marche avec une canne.
Bénédicte Jullien, mère de 2 enfants souffrant quant à elle d’un locked-in syndrome, voudrait qu’on arrête de traiter les gens dans son état comme des « idiots », exaspérée qu’ « on dise bonjour à son mari et pas à elle, ou qu’on parle d’elle à la 3e personne en sa présence ». Communiquant grâce à l’aide d’un ordinateur qui déchiffre le mouvement de ses yeux, elle déclare : « Je vis le moment présent, et si un jour la médecine fait des progrès, tant mieux ».
Steven Laureys compte dépenser son prix pour aider les patients et leurs familles, ainsi que pour des essais cliniques afin de développer de nouveaux traitements. Et déclare « ce n’est pas à moi, en tant que neurologue et médecin, de décider si une vie d’être vécue ».
Pour aller plus loin :
Patients en état de conscience minimale : stimuler et rééduquer par la stimulation cérébrale ?
France Bleu, Marie-Line Napias (20/01/2020) – The Guardian, Jennifer Rankin (19/01/2020)