France: le recours à l’AMP et ses conséquences

Publié le 10 Avr, 2013

 En France, depuis 1982, année de la naissance d’Amandine, le premier bébé FIV [Fécondation in vitro], l’assistance médicale à la procréation (AMP) s’est beaucoup développée: on compte plus de 50 000 naissances par an de bébés conçus par ces techniques. La réussite d’une AMP, explique le Dr Laurence Foix-L’Hélias, pédiatre épidémiologiste à l’hôpital Trousseau après avoir travaillé plusieurs années avec le Pr René Frydman, à l’hôpital Antoine Béclère (Clamart), ne “s’évalue pas uniquement sur un nombre d’embryons [créé], ou sur un taux de grossesse, mais sur la naissance d’un enfant bien portant“. Voilà donc la principale question qui intéresse la santé de ces enfants nés par AMP: “est-elle différente de celle des enfants conçus naturellement?” 

 

Cette question se pose à double titre: “d’une part en raison des techniques utilisées, de l’autre en raison du terrain de l’hypofertilité parentale, et en particulier de l’âge […] avancé [de la mère]”. Car plus l’âge maternelle augmente plus le risque de malformations augmentent. Il est donc difficile aujourd’hui pour le pédiatre d’imputer les risques de malformation à certaines techniques, le terrain maternel étant en dehors de la technique utilisée assez déterminant.

 

Aujourd’hui, on est tout de même “globalement rassuré sur les techniques anciennes, comme la FIV classique“, mais depuis que “l’arsenal de l’AMP s’est enrichi de nouvelles techniques, qui pourraient être pourvoyeuses de risques spécifiques” […] “on a beaucoup moins de recul pour les techniques très innovantes“. En effet, “la production des ovocytes obtenus par stimulation hormonale, [la] manipulation des gamètes in vitro, [la] suppression des processus naturels de sélection, [le] milieu de culture des embryons, [la] politique de transfert des embryons“, sont autant d’étapes qui “bouleversent le cours naturel des choses“.  

 

Il faut noter que les complications périnatales sont tout de même plus importantes que les grossesses spontanées, mais elles sont “maintenant bien identifiées” et on ne “[remet] pas en cause l’utilisation de l’AMP“. En effet on sait que “le taux de prématurité est multiplié par 5, le taux d’hypotrophie par 3, le nombre d’hospitalisation par 3 et la mortalité néonatale par 6“. La journaliste relève en outre que malgré des “résultats [d’]études […] parfois contradictoires“, il a tout de même “été rapporté un risque plus important de certaines malformations congénitales, comme certaines cardiopathies mais aussi des anomalies de fermeture de tube neural“.

 

Cependant, “suivre les enfants conçus par AMP s’apparente à un parcours d’obstacles” car mettre en place des cohortes est extrêmement compliqué. La seule possibilité pour évaluer au mieux la réussite de l’AMP est donc “d’essayer de répondre à des questions ponctuelles reposant sur une hypothèse précise”. Mais, ces questionnaires, aussi précis soient-ils ne suffisent pas toujours. Un réel suivi nécessiterait un examen clinique. La pédiatre épidémiologiste cite par exemple la découverte “plusieurs années après qu’un enfant né par AMP était atteint de trisomie 21. Jamais l’information n’était parvenue au centre qui avait pratiqué la FIV”. Elle ajoute étonnée: “devant notre surprise, la maman nous a répondu: ‘le questionnaire demandait si mon enfant allait bien. Eh bien j’ai répondu que, oui, il allait bien’ “. 

 

Finalement, la pédiatre conclu que l’AMP n’est pas dénuée de tous risques, et que les parents doivent en être informés. Une fois qu’ils ont pris leur décision, ils doivent “accepter les incertitudes que l’on peut maîtriser quand on choisit de donner la vie“.

 Le Quotidien du Médecin (Dr Irène Drogou) 11/04/2013

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