FIV : influence du milieu de culture des embryons sur leur développement à long terme

Publié le 2 Jan, 2012

Le 28 décembre 2011, l’équipe de Jean-Pierre Ozil, chercheur à l’Institut national de recherche agronomique (INRA), a publié une étude menée sur des embryons de souris conçus par fécondation in vitro (FIV), montrant que des modifications du milieu de culture des embryons influence le développement à venir des nouveaux-nés puis des souris adultes. Publiés dans la revue PloS One, les résultats expérimentaux de cette étude interrogent les pratiques d’assistance médicale à la procréation (AMP).

Jean-Pierre Ozil a élaboré une machine pouvant, à la seconde près, modifier le milieu dans lequel baignent les gamètes puis l’embryon. Ses travaux montrent que des variations ponctuelles du milieu de culture des embryons, lorsque ceux-ci ne sont constitués que d’une cellule, entrainent des modifications du métabolisme et du poids des souriceaux, tant à la naissance qu’à l’âge adulte. Ces différences de poids se résorbent parfois lorsque l’animal grandit mais peuvent aussi subsister à l’âge adulte en fonction de la composition du milieu de culture de l’embryon. "Notre technique permet de piloter le métabolisme de l’oeuf, chez la souris, mais aussi chez les bovins ou le poisson", explique Jean-Pierre Ozil, dont le but est l’obtention d’animaux plus robustes.

Si ces manipulations présentent un intérêt pour l’élevage, des interrogations demeurent. On ne sait pas, par exemple, si ces modifications sont transmises aux générations suivantes. De plus, on ne connaît pas les mécanismes régissant ces phénomènes : il reste à découvrir le "capteur métabolique" qui module l’activité énergétique de la cellule, puis celle de l’individu adulte.

Ces travaux soulèveraient en outre de nombreuses questions s’ils étaient appliqués à la fécondation in vitro chez l’homme. Jean-Pierre Ozil souligne que "si on choisit le milieu de culture en connaissance de cause, on commence à fabriquer. Il faudra une réflexion sur ces questions". Se disant intéressé par les résultats de cette étude, le biologiste Jacques Testart en juge les résultats "troublants" : "cela confirme les inquiétudes qu’on pouvait avoir sur des manipulations un peu hasardeuses". Il considère que la culture in vitro d’embryons plusieurs jours avant implantation comme la maturation in vitro d’ovocytes relèvent d’"exploits techniques" non justifiés. En outre, si l’on ne voit pas de problèmes majeurs de santé chez les enfants nés par FIV, il recommande de limiter le séjour de l’embryon en milieu artificiel. Sur un certain nombre de techniques actuellement en développement, "comme la congélation des ovocytes, la maturation in vitro de l’embryon ou le diagnostic préimplantatoire, il faut plus de données", indique de son côté René Frydman.
Actuellement, l’utilisation des milieux de culture est réglementée. Il reste que la recherche fondamentale est nécessaire pour "compléter les connaissances sur les besoins de l’embryon, encore très récentes", estime Françoise Merlet, référente AMP à l’Agence de la biomédecine.

Le Monde Science et Techno (Hervé Morin) 31/12/11 et 01-02/01/12

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