Les moyens utilisés pour permettre la surveillance médicale de la grossesse n’ont cessé de se sophistiquer avec le développement des connaissances scientifiques sur le fœtus. Si ces moyens ont permis d’améliorer la santé de la mère mais également celle de l’enfant, ils suscitent de nombreuses questions parmi lesquelles l’importance ou non de "tout savoir de son bébé à naître".
Pour Myriam Szejer, pédopsychiatre et psychanalyste, fondatrice de l’association "La cause des bébés", association de professionnels constituée autour de l’accueil fait aux bébés, on "ne laisse plus les mères rêver tranquillement au bel enfant qu’elles sont en train de fabriquer. C’est comme si […] à chaque rendez-vous, elles devaient venir chercher un certificat de conformité, le feu vert pour continuer la grossesse". A chaque examen, il y a "l’anxiété […]de ne pas réussir l’épreuve du bébé parfait, de la mère parfaite". Elle ajoute que si "médicalement " il est "intéressant de pouvoir explorer, prévenir, soigner, voire guérir", elle note que "le psychisme maternel est plus ou moins équipé pour résister à cette exigence de bébé parfait que demande la société".
Par conséquent, Catherine Mathelin, psychologue dans les services de pédopsychiatrie et réanimation néonatale des hôpitaux de Saint-Denis, considère qu’il faudrait adapter la surveillance médicale de la grossesse à la mère, selon que cette surveillance "fragilise" ou au contraire "rassure énormément" la mère.
Aujourd’hui, la liste des maladies que l’on peut identifier s’accroît plus rapidement que celles que l’on peut soigner. De plus, la volonté de bien soigner, "le principe de précaution" ou encore l’inquiétude d’être attaqué par les parents en cas de problème qui n’aurait pas été décelé, incitent les médecins à prescrire davantage d’examens. Or, selon Myriam Szejer, lorsque les premières analyses sont effectuées, l’attente "peut être dévastatrice" car "les mères dont le bébé est ‘potentiellement’ atteint mettent leur grossesse comme entre parenthèse en attendant les résultats, ne portent plus leur bébé de la même façon". Et elle ajoute qu’ "une fois rassurée, leur angoisse ne s’apaise pas complètement. Elles continuent à considérer l’enfant comme ‘potentiellement’ malade, y compris longtemps après la naissance".
Ainsi, si le dépistage prénatal peut permettre le traitement de certaines maladies in utero, cela n’est pas le cas pour toutes, comme la trisomie 21, dont la détection aboutit très généralement à une IVG.
La Croix (Guillemette de La Borie) 28/03/12