« Être là » – Le témoignage d’un avocat engagé en soins palliatifs face au projet de légalisation de l’euthanasie

23 Mai, 2025

Dans une vidéo diffusée aujourd’hui, Erwan Le Morhedec, avocat et bénévole en soins palliatifs, interpelle les députés français sur les dangers éthiques, humains et juridiques de la proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie. À travers une parole incarnée, il oppose à la tentation d’un geste létal la puissance de la présence et de l’accompagnement. Il s’adresse “aux députés indécis, à partir du réel

Erwan Le Morhedec, engagé depuis plus de vingt ans dans le débat bioéthique, prend la parole en tant que citoyen, juriste et accompagnant en fin de vie. Il ne s’agit pas ici d’une tribune théorique mais d’un témoignage personnel, nourri d’expériences concrètes vécues auprès de personnes gravement malades, âgées, souvent isolées. À l’heure où le Parlement s’apprête à voter une loi sur l’”aide à mourir”, l’objectif de cette vidéo est clair : rappeler que l’euthanasie ne peut être une réponse aux drames de l’isolement et du désespoir.

Partir du réel
Erwan Le Morhedec relate plusieurs rencontres poignantes avec des personnes en fin de vie : une femme de 70 ans, seule et épuisée, qui avait perdu le goût de vivre ; Claude, vieil homme désespéré qui a retrouvé la joie à l’annonce d’un arrière-petit-fils ; ou encore une femme résolue à aller en Belgique pour une euthanasie, qui a changé d’avis après avoir connu la chaleur humaine des soignants.
Toutes ces personnes avaient exprimé une demande de mort. Aucune n’était motivée par des douleurs physiques insupportables, mais plutôt par l’isolement, le sentiment d’être un poids, ou une lassitude existentielle. Or, comme le rappelle Erwan Le Morhedec, « ce ne sont pas les douleurs physiques qui suscitent les demandes de mort », une constatation étayée par des études scientifiques.

Critique de la proposition de loi et implications juridiques
Avocat, il s’inquiète du flou juridique et de l’extension prévisible du champ de la loi. Il dénonce une législation trop large, qui rendrait éligibles à l’euthanasie des centaines de milliers de Français, bien au-delà des « cas exceptionnels » souvent invoqués. La souffrance psychologique deviendrait un critère suffisant ; des personnes sous tutelle pourraient être concernées ; la demande pourrait être faite sans preuve écrite ; les garanties prévues, telles que le délai de 48 heures, sont jugées illusoires.
Erwan Le Morhedec souligne également l’absence de contrôle effectif : le seul suivi prévu interviendrait a posteriori, sur la base des déclarations du médecin ayant pratiqué l’euthanasie, sans qu’aucun contre-examen ne soit imposé.

Entre accompagnement et abandon
Ce témoignage s’inscrit dans une vision éthique cohérente avec le respect de la vie et de la dignité de chaque personne, quelles que soient sa fragilité ou sa dépendance. Toute confusion entre sédation palliative et euthanasie doit être levée : l’accompagnement en fin de vie, s’il est humainement et médicalement bien mené, peut apaiser les souffrances sans jamais abréger volontairement la vie.
Erwan Le Morhedec invite à « être là » – non pas pour hâter la fin, mais pour écouter, soutenir, et manifester par une main tenue que le monde ne se passera pas d’eux. La main tendue ne doit pas être celle qui pousse au départ, mais celle qui affirme la dignité de rester.

Un appel à la responsabilité
« Je ne suis personne », conclut-il humblement, mais ce témoignage résonne comme un appel pressant à la conscience des législateurs. La proposition de loi ouvre une brèche inquiétante : celle d’un abandon légalisé des plus vulnérables, déguisé en compassion.

Loin de rejeter la souffrance, ce témoignage appelle à y répondre non par la mort, mais par une solidarité agissante. Être là, vraiment, pleinement, demeure le plus bel acte d’humanité. Une société digne de ce nom ne peut choisir d’éliminer ceux qui lui rappellent sa propre vulnérabilité.

Les députés indécis auxquels Erwan Le Morhedec s’adresse tout particulièrement sont ainsi mis en garde sur le danger : “Si vous votez ce texte, ce sera la porte ouverte à tous les vents, ouverte à une abdication de notre humanité.

DERNIERES ACTUALITES
Fin de vie : quatre sénateurs désignés rapporteurs

Fin de vie : quatre sénateurs désignés rapporteurs

La Commission des affaires sociales du Sénat a désigné, le 11 juin, les rapporteurs chargés des deux propositions de loi portant sur la fin de vie. Deux textes, deux orientations : d’un côté, le renforcement de l’accès aux soins palliatifs (cf. « Prenez vos...

Partager cet article

Toute l’actualité bioéthique
chez vous, gratuitement

Cochez vos choix :

Votre courriel est nécessaire à l'envoi de la lettre. Pour en savoir plus sur la gestion de vos données personnelles et pour exercer vos droits, consultez notre politique de confidentialité.

Recevez notre lettre hebdomadaire

Recevez notre lettre hebdomadaire

Chaque semaine notre décryptage de l'actualité bioéthique et revue de presse.

Votre inscription a bien été prise en compte.