Le numéro de juillet de la revue ESPRIT est consacré aux « spéculations sur la génétique ». Gènéthique passe en revue ce dossier dense et pointu au fil de la semaine à travers les synthèses de 5 articles qui le composent, le sixième ayant déjà été évoqué (Cf. Synthèse de presse Gènéthique du 3 juillet 2014). Aujourd’hui : dépasser l’incertitude.
La « médecine prédictive » désigne « l’anticipation d’événements seulement probables et reconnus comme tels » via l’utilisation de tests génétiques en particulier. Paul-Loup Weil-Dubuc, coordinateur du dossier, docteur en philosophie et chercheur en éthique, souligne le double paradoxe étymologique qui sous-tend l’ambigüité de cette notion : « pré-dire » – « dire-avant » – efface l’incertitude de l’avenir et ruine de fait la « vocation ‘préventive’ » de la médecine. Que faire face à un avenir qui serait déjà écrit ?
A l’image de Pascal confronté dans ses Pensées à la croyance ou non en l’existence de Dieu, il met en place un système logique de « deux paris face à l’incertitude » à laquelle le génome confronte l’Homme. Selon le premier, « l’incertitude proviendrait de l’incompétence (provisoire) de la science », le futur serait ainsi à portée de connaissance, à condition de mettre a point les technologies nécessaires à sa lecture. Au contraire, le pari de « l’incertitude ontologique » explique « notre incertitude (définitive) par l’imprévisibilité irréductible de la réalité ».
Reprenant Pascal, Paul-Loup Weil-Dubuc rappelle que « nous sommes ‘embarqués’ », que nous devons parier et que quatre raisons l’incitent à miser sur le second pari, celui de l’incertitude ontologique.
– Le « rapport à la prévention » : quand le premier pari contraint aux extrêmes de la fatalité ou de la« toute-puissance », le second « n’exclut aucunement la prévention (…) mais invite à la comprendre comme un acte de prudence face à un avenir assumé comme contingent ».
– Le « rapport à la responsabilité médicale » : quand le premier pari enferme les médecins dans l’infaillibilité juridique de la prédiction, le second met en avant l’approche singulière du médecin avec chaque patient.
– Le « rapport au corps » : quand le premier pari place le corps dans une « soumission par rapport aux informations génétiques » et incite à l’Homme à s’en méfier, le second entretient la confiance « dans sa capacité à surmonter les événements qui le menacent ».
– Le « rapport à la solidarité collective » : quand le premier pari suppose que les individus sont « fondamentalement inégaux » et instaure une réticence à payer pour les autres en fonction de son propre profil génétique, le second assume une collectivité face aux accidents.
– Le « rapport à la prévention » : quand le premier pari contraint aux extrêmes de la fatalité ou de la« toute-puissance », le second « n’exclut aucunement la prévention (…) mais invite à la comprendre comme un acte de prudence face à un avenir assumé comme contingent ».
– Le « rapport à la responsabilité médicale » : quand le premier pari enferme les médecins dans l’infaillibilité juridique de la prédiction, le second met en avant l’approche singulière du médecin avec chaque patient.
– Le « rapport au corps » : quand le premier pari place le corps dans une « soumission par rapport aux informations génétiques » et incite à l’Homme à s’en méfier, le second entretient la confiance « dans sa capacité à surmonter les événements qui le menacent ».
– Le « rapport à la solidarité collective » : quand le premier pari suppose que les individus sont « fondamentalement inégaux » et instaure une réticence à payer pour les autres en fonction de son propre profil génétique, le second assume une collectivité face aux accidents.
Face à la « radicale contingence de l’avenir », Paul-Loup Weil-Dubuc invite à choisir individuellement et collectivement l’incertitude ontologique pour accepter « ce qui arrive avec plus d’aisance et de confiance ».
ESPRIT (Paul-Loup Weil-Dubuc) Juillet 2014