Edition du génome des embryons humains : la Convention d’Oviedo, dernier rempart ?

Publié le 21 Juin, 2021

Dans son article 13, la Convention d’Oviedo interdit les modifications de génome humain qui seraient héréditaires. Elle interdit donc l’édition du génome humain d’un embryon. Toutefois, début juin, un groupe de travail a été lancé pour apporter des « précisions » à cet article, dont on peut craindre une tentative de contourner l’interdit.

La Convention d’Oviedo, un texte a minima remis en question

La Convention d’Oviedo est un texte international de référence dans le domaine de la bioéthique, seul texte dans ce domaine qui soit contraignant pour les Etats l’ayant ratifié. Elaborée au cours des années 1990, elle est en vigueur dans 29 des 47 pays membres du Conseil de l’Europe[1]. Si elle a le mérite d’être le premier texte donnant comme cadre commun des principes éthiques aux Etats signataires, ces principes y ont toutefois été réduits au minimum.

Ces dernières années, avec l’émergence des techniques d’édition du génome et notamment les « ciseaux génétiques » CRISPR Cas9, certains Etats revendiquent une révision de l’article 13[2] de la Convention. Cet article interdit toute intervention médicale aboutissant à une modification du génome humain qui serait héréditaire ainsi que toute modification du génome humain non héréditaire mais qui ne serait pas justifiée par des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques. Il interdit donc la modification du génome de l’embryon humain.

Jouer sur les mots, une tentative de contourner l’interdit ?

La Convention d’Oviedo est un document juridique obtenu au terme d’une laborieuse négociation. Toute modification serait vouée à l’échec, car elle nécessiterait l’accord de tous les pays signataires. Une autre solution serait la rédaction d’un protocole additionnel à la Convention, comme cela a été le cas pour le clonage humain, les transplantations d’organes, la recherche biomédicale et les tests génétiques à des fins médicales. Mais le Conseil des Ministres a rejeté cette option.

Début juin, le Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe a confirmé « que les conditions n’étaient pas réunies pour une modification de l’article 13 ». En revanche, un groupe de travail devra « apporter des précisions » sur cet article, notamment sur les termes « préventives, diagnostiques ou thérapeutiques », afin de distinguer l’aspect recherche de l’aspect application clinique.

L’objectif est de concilier respect de l’article 13 et recherche sur l’embryon humain, autorisée dans de nombreux Etats signataires. Concilier ou contourner ? Les « précisions » laisseraient la possibilité de modifier le génome d’embryon humain « pour la recherche », c’est-à-dire sans qu’ils ne soient implantés, mais détruits au 14ème jour de développement. Une ligne rouge que les députés français ont déjà franchie avec le projet de loi bioéthique.

 

[1] La France l’a pour sa part ratifiée en décembre 2011, pour une entrée en vigueur en avril 2012 mais cela n’a entrainé aucun changement significatif, le législateur ne voyant pas de contradiction entre le droit français et la Convention.

[2] Article 13 – Interventions sur le génome humain : Une intervention ayant pour objet de modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques et seulement si elle n’a pas pour but d’introduire une modification dans le génome de la descendance.

Photo : iStock DR

Cet article de la rédaction Gènéthique a été initialement publié sur le site Aleteia sous le titre : Édition du génome des embryons humains : la convention d’Oviedo, dernier rempart ?

Camille YAOUANC

Camille YAOUANC

Expert

Docteur en pharmacie Thèse sur la clause de conscience Master en bioéthique de l'IPLH

Partager cet article

Textes officiels

Fiches Pratiques

Bibliographie

Lettres