Des scientifiques du Cincinnati Children’s indiquent être parvenus à produire un tissu hépatique qui développe « ses propres vaisseaux sanguins internes ». Cette étude, dirigée par le Dr Takanori Takebe du Cincinnati Children’s Center for Stem Cell and Organoid Research and Medicine (CuSTOM), a été publiée dans la revue Nature Biomedical Engineering [1]. Elle a été réalisée en collaboration avec des chercheurs de l’Institute of Science Tokyo, de l’Icahn School of Medicine Mount Sinai et de Takeda Pharmaceutical Company.
Ces organoïdes de foie ont été fabriqués à parti de cellules souches pluripotentes induites (iPSC), placées dans des « gels spéciaux » conçus pour inciter les cellules à se différencier en types de tissus spécifiques. Le Cincinnati Children’s affirme avoir développé le « premier organoïde intestinal fonctionnel » cultivé à partir d’iPSC, en 2010.
Jusqu’à récemment, la taille des organoïdes cultivés en laboratoire était limitée parce qu’ils n’incluaient pas les tissus qui relient les organes au reste du corps, tels que les nerfs et les vaisseaux sanguins. Une raison du succès de ces travaux est d’avoir cherché à différencier des cellules iPS en progéniteurs endothéliaux [2] sinusoïdaux hépatiques, donc spécifiques au foie, quand d’autres études cherchant à ajouter une vascularisation aux organoïdes se sont appuyées sur des cellules endothéliales artérielles « entièrement engagées ».
Vers un traitement de l’hémophilie ?
Cette recherche pourrait déboucher sur de nouveaux moyens d’aider les personnes atteintes d’hémophilie et d’autres troubles de la coagulation. Actuellement, l’hémophilie est traitée par l’injection de préparations destinées à remplacer les facteurs de coagulation manquants. Cependant, le sang humain contient une douzaine de facteurs de coagulation différents et il n’existe pas de sources de protéines humaines pour les facteurs de coagulation V ou XI. De plus, environ 20 % des personnes atteintes d’hémophilie A développent des inhibiteurs au traitement standard.
« Ces organoïdes hépatiques avancés peuvent sécréter ces facteurs de coagulation », affirme le Dr Takebe. « S’ils peuvent être produits à grande échelle, ils pourraient devenir une source de traitement viable qui bénéficierait aux personnes qui ont développé des inhibiteurs ou qui ne sont pas indiquées pour la thérapie génique », considère-t-il (cf. Hémophilie B : une thérapie génique toujours efficace au bout de 13 ans).
Par ailleurs, les personnes souffrant d’insuffisance hépatique aiguë ou chronique ne produisent pas suffisamment de facteurs de coagulation, ce qui les expose à un risque accru de complications hémorragiques lors d’une intervention chirurgicale. Ces organoïdes pourraient également aider ces patients. Et, à plus long terme, des organoïdes hépatiques « de plus en plus sophistiqués » pourraient fournir des « tissus de réparation » qui aideraient les foies malades à « se guérir eux-mêmes ».
Complément du 01/07/2025 : Une autre équipe de l’hôpital pour enfants de Cincinnati indique être parvenue à fabriquer des tissus pulmonaires humains « capables de produire leurs propres vaisseaux sanguins ». Les chercheurs ont publié leurs travaux le 30 juin dans la revue Cell.
Pour le Dr Mingxia Gu, auteur de l’étude, « cette méthode pourrait également être appliquée à d’autres organes tels que l’intestin et le côlon ».
Les scientifiques ont différencié des cellules iPS en plusieurs types de cellules, puis ont identifié « le bon moment » pour les mettre en contact les unes avec les autres. Ainsi, les cellules progénitrices qui auraient pu devenir des vaisseaux sanguins ou les parois externes du poumon sont devenues des vaisseaux sanguins.
[1] Saiki et al, Self-organization of sinusoidal vessels in pluripotent stem cell-derived human liver bud organoids, Nature Biomedical Engineering 2025). DOI: 10.1038/s41551-025-01416-6
[2] Les cellules endothéliales sont celles qui tapissent la face interne des vaisseaux
Sources : Medical Xpress, Cincinnati Children’s Hospital Medical Center (25/06/2025) ; AP news (30/06/2025) – Photo : iStock